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ExclusifZones d’activités : « L’implication des collectivités est une spécificité française » (G. Novarina)

News Tank Cities - Paris - Actualité n°216621 - Publié le 04/05/2021 à 17:30
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« Une des spécificités de la France a été l’implication des collectivités publiques (État puis communes) dans la mise sur le marché de terrains équipés et à bon marché à destination des entreprises. Dans les autres pays européens - c’est particulièrement le cas de l’Italie, pays dont le développement est encore aujourd’hui fondé sur les districts (industriels, agricoles ou technologiques) - les collectivités publiques se sont contentées de réserver dans leur plan d’urbanisme des espaces pour les activités économiques et les entreprises privées ont assuré les acquisitions foncières et les réalisations immobilières. La situation française a ceci de paradoxal que les entreprises se sont d’une certaine manière habituées à ne pas acheter les terrains sur lesquels elles s’installent au prix du marché », indique à News Tank Gilles Novarina Professeur @ Université Grenoble Alpes (2016-2020) (UGA)
Ouvrages :• « Plan et projet. L’urbanisme en France et en Italie » (éd. Anthropos, 2003).• « Sociétés urbaines et nouvelles économies » (éd…
, professeur d’urbanisme, École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, le 04/05/2021.

Gilles Novarina intervient sur le thème « Pourquoi et comment renouveler les zones d’activités économiques ?  », dans le cadre du 2e d’une série de 10 webinaires organisés par le Plan urbanisme construction architecture • Activité : Organisme interministériel de recherche et d’expérimentation dans les domaines de l’urbanisme, de la construction et de l’architecture, rattaché au ministère de la Transition écologique… , sur la « ville productive », le 12/05/2021.

« La conservation de zones d’activités économiques en ville est un impératif non seulement du point de vue économique mais aussi écologique. Il nous est apparu nécessaire d’avoir une idée précise des activités présentes sur les zones d’activités, des conditions de leur pérennité et des services dont elles ont besoin pour assurer leur développement. Certaines zones sont sous-utilisées et peuvent faire l’objet de mutations d’usages. Des stratégies d’optimisation doivent être mise en œuvre et il convient de réfléchir au degré de mixité qu’il convient d’y introduire », indique le professeur.

« Les responsables économiques et politiques ont fait le choix d’une spécialisation dans les activités de conception et de mise au point des produits, parce qu’elles étaient censées créer le plus de valeur ajoutée. Cette stratégie qui voit dans l’innovation technologique le seul moteur du développement constitue une impasse du point de vue de la création d’emplois. La Ville de Grenoble • Commune du département de l’Isère en région Auvergne-Rhône-Alpes• Population : 158 198 habitants• Superficie : 18,13 km• Intercommunalité : Grenoble-Alpes Métropole• Maire : Éric Piolle, élu en… , dans laquelle je réside au moins partiellement, est un bon exemple en la matière : la métropole qui est particulièrement performante en matière de recherche scientifique et technologique a un taux de chômage égal à la moyenne nationale et un solde migratoire négatif ».

Gilles Novarina répond aux questions de News Tank.


« La conservation de zones d’activités économiques en ville est un impératif économique, mais aussi écologique »

Pouvez-vous présenter la collaboration que vous menez entre le Laboratoire Architecture Environnement et Cultures Constructives et le Centre d’échanges et de ressources foncières, pour aborder la question de la requalification durable des parcs d’activités ?

Notre projet de recherche-action s’appuie sur un partenariat avec les acteurs du foncier et de l’immobilier »

Le Laboratoire AE&CC, rattaché à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble • Activités : École d’architecture• Création : 1927• Effectifs : 183 agents dont 85 ETP chercheurs et enseignants-chercheurs et 45 agents administratifs• Étudiants : 901 étudiants (2018-2019), dont… et à l’Université Grenoble Alpes, associe architectes, urbanistes, aménageurs et analyse les modèles architecturaux et urbanistiques à partir desquels se construisent les stratégies de projet. Elle s’interroge sur la manière dont ces stratégies se recomposent pour faire face aux impératifs de préservation de l’environnement, de remise en état de la biodiversité et de lutte contre le changement climatique.

Notre projet sur une possible requalification durable des parcs d’activités s’appuie sur le partenariat avec les acteurs du foncier et de l’immobilier que le CERF Centre d'échanges et de ressources foncières Auvergne-Rhône-Alpes - Le CERF Auvergne-Rhône-Alpes est un pôle de compétences régional dédié au foncier et l’aménagement a construit à l’échelle régionale. C’est ce partenariat qui nous a rapidement permis de définir des terrains d’études et d’impliquer les acteurs concernés dans l’élaboration de scénarios de requalification.

Votre recherche définit comme périmètre d’analyse la Région Auvergne-Rhône-Alpes. En l’état de vos travaux, pensez-vous d’ores-et-déjà que les résultats seront transposables à d’autres régions ?

Les principales villes de la Région AURA doivent aujourd’hui relever le défi d’une diversification de leurs économies »

Les principales villes de la Région Auvergne Rhône-Alpes, qu’il s’agisse des métropoles (Lyon, Genève, Grenoble, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand) ou de villes moyennes (Annecy, Roanne) sont ou ont été des villes industrielles de première importance. Elles doivent aujourd’hui relever le défi d’une diversification de leurs économies avec le développement de la recherche scientifique et technologique d’une part, des activités présentielles de l’autre. Les résultats de la recherche seront sans doute transposables à d’autres régions, à l’exception de celles (Nord et Est de la France) qui ont été marquées par l’industrie du charbon et du fer et qui ont connu un déclin se traduisant par l’existence de très vastes friches.

Pouvez-vous rappeler les grandes tendances qui marquent l’évolution des parcs d’activités ?

Une coexistence doit être organisée avec les quartiers résidentiels »

Les évolutions qu’ont connu, depuis le début des années 1950, les zones d’activités expliquent aujourd’hui leur grande diversité. Certaines ont su garder leurs fonctions d’origine - c’est le cas par exemple des parcs technologiques - d’autres ont vu partir leurs entreprises et accueillent des activités (production industrielle et artisanale, logistique, commerce, loisirs de nuit, services) qui coexistent parfois difficilement. Les entreprises qui les habitent sont aujourd’hui à la recherche de nouveaux services et une coexistence doit être organisée avec les quartiers résidentiels qui les environnent.

Le lien entre politique publique, zone d’activité économique et dynamisme des entreprises dans les aires urbaines est-il le même partout en Europe ?

Une des spécificités de la France a été l’implication des collectivités publiques »

Mes principaux travaux de recherche ont porté sur des comparaisons avec l’Angleterre, l’Italie ou la Suisse. Une des spécificités de la France a été l’implication des collectivités publiques (État puis communes) dans la mise sur le marché de terrains équipés et à bon marché à destination des entreprises. Dans les autres pays européens - c’est particulièrement le cas de l’Italie, pays dont le développement est encore aujourd’hui fondé sur les districts (industriels, agricoles ou technologiques) - les collectivités publiques se sont contentées de réserver dans leur plan d’urbanisme des espaces pour les activités économiques et les entreprises privées ont assuré les acquisitions foncières et les réalisations immobilières. La situation française a ceci de paradoxal que les entreprises se sont d’une certaine manière habituées à ne pas acheter les terrains sur lesquels elles s’installent au prix du marché.

Les zones d’activités sont-elles les grandes oubliées des réflexions urbaines et architecturales, selon vous ?

Les réflexions sur les zones industrielles sont très sommaires »

Les zones industrielles sont nées à l’occasion de la mise en œuvre à grande échelle de l’urbanisme des Congrès Internationaux d’Architecture Moderne. Mais, alors que Le Corbusier par exemple avait sans cesse à la bouche le terme de ville industrielle, les réflexions sur les zones industrielles sont très sommaires. François Parfait, ancien directeur de la Société Centrale d’Équipement du Territoire (filiale de la Caisse des Dépôts) et un des principaux responsables de la politique des grands ensembles, explique dans un numéro de la revue Urbanisme, qui date de 1962, qu’en matière de zones industrielle, les collectivités publiques doivent se contenter d’acquérir les terrains et de les équiper, la responsabilité de la construction incombant aux seuls chefs d’entreprise. Nous nous sommes ainsi privés d’une réflexion sur le bon habitat à mettre en place pour accueillir les activités économiques.

Existe-il une conciliation possible entre retour ou maintien des zones d’activités, et impératif écologique ?

La conservation de zones d’activités économiques en ville est un impératif »

La désindustrialisation particulièrement marquée en France - les derniers rapports de France Stratégie sont clairs sur ce constat - découlent d’une multitude de facteurs dont la raréfaction des terrains disposant des services nécessaires à l’accueil des entreprises et bien localisés au sein des agglomérations urbaines. La conservation de zones d’activités économiques en ville est un impératif non seulement du point de vue économique mais aussi écologique. Il nous est apparu nécessaire d’avoir une idée précise des activités présentes sur les zones d’activités, des conditions de leur pérennité et des services dont elles ont besoin pour assurer leur développement. Certaines zones sont sous-utilisées et peuvent faire l’objet de mutations d’usages. Des stratégies d’optimisation doivent être mise en œuvre et il convient de réfléchir au degré de mixité qu’il convient d’y introduire.

À l’aune de la crise de la Covid, et des effets de « la société hyper industrialisée », auxquels vous faites référence, quelles sont les tendances qui se dessinent afin de restructurer les zones d’activité dans la ville productive et quelles peuvent en être les conditions ?

Cette stratégie qui voit dans l’innovation technologique le seul moteur du développement constitue une impasse »

Le terme de société hyper industrialisée a été inventé par Pierre Veltz et il permet de souligner le maintien d’un niveau élevé d’activités industrielles à l’échelle mondiale. Si Pierre Veltz souligne, à juste raison, l’imbrication croissante de la production de biens manufacturiers et de services, il passe sous silence les spécificités des modes de développement adoptés par les différents pays européens par exemple : à la différence de l’Allemagne, mais aussi de l’Italie ou de l’Espagne, la France et la Grande-Bretagne ont pendant de longues années choisi la désindustrialisation.

Les responsables économiques et politiques ont fait le choix d’une spécialisation dans les activités de conception et de mise au point des produits, parce qu’elles étaient censées créer le plus de valeur ajoutée. Cette stratégie qui voit dans l’innovation technologique le seul moteur du développement constitue une impasse du point de vue de la création d’emplois. Grenoble, ville dans laquelle je réside au moins partiellement, est un bon exemple en la matière : la métropole qui est particulièrement performante en matière de recherche scientifique et technologique (si l’on prend les indicateurs que sont les emplois de conception et de recherche ou ceux de cadres dans les fonctions métropolitaines) a un taux de chômage égal à la moyenne nationale et un solde migratoire négatif.

Gilles Novarina


Ouvrages :

• « Plan et projet. L’urbanisme en France et en Italie » (éd. Anthropos, 2003).

• « Sociétés urbaines et nouvelles économies » (éd. L’Harmattan, 2010).


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Parcours

Université Grenoble Alpes (2016-2020) (UGA)
Professeur
Ensag (École nationale supérieure d’architecture de Grenoble)
Chercheur au laboratoire Architecture environnement et cultures constructives
Institut d’urbanisme de Grenoble
Professeur
Université Grenoble Alpes (2016-2020) (UGA)
Docteur en urbanisme, habilité à diriger des recherches

Fiche n° 43585, créée le 04/05/2021 à 15:09 - MàJ le 04/05/2021 à 15:26

Ensag (École nationale supérieure d’architecture de Grenoble)

• Activités : École d’architecture
• Création : 1927
• Effectifs : 183 agents dont 85 ETP chercheurs et enseignants-chercheurs et 45 agents administratifs
• Étudiants : 901 étudiants (2018-2019), dont 44 doctorants
• Directrice : Pascale Chardon-Leyes (directrice par intérim), puis Thomas Spiegelberger à compter du 01/12/2023
Xavier Crépin, responsable du service communication, valorisation et diffusion
• Tél. : 04 76 69 83 00


Catégorie : Etat et autorités publiques


Adresse du siège

60 Avenue de Constantine
38036 Grenoble Cedex 2 France


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Fiche n° 12141, créée le 04/05/2021 à 15:41 - MàJ le 10/11/2023 à 11:16

Plan urbanisme construction architecture (Puca)

• Activité : Organisme interministériel de recherche et d’expérimentation dans les domaines de l’urbanisme, de la construction et de l’architecture, rattaché au ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires.
• Création : 23/04/1998 (par arrêté ministériel)
• Compositon :
- 1 comité des parties prenantes chargé de définir les priorités de recherche et de réunir des représentants des instances administratives, des milieux scientifiques, des milieux professionnels et des décideurs urbains (collectivités locales et aménageurs publics), présidé par Robert Herrmann, président de Strasbourg Eurométropole
- 1 conseil scientifique composé de 10 membres
- 1 secrétariat permanent chargé de piloter l’exécution des programmes et d’en valoriser les résultats
• Secrétaire permanente : Hélène Peskine
• Tél. : 01 40 81 24 37
Contact

Catégorie : Etat et autorités publiques


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Fiche n° 6534, créée le 09/02/2018 à 11:35 - MàJ le 20/02/2023 à 13:12