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Exclusif« Un data center n’est pas une unité de production de chauffage » (F. Coquio, Interxion France)

News Tank Cities - Marseille - Interview n°215635 - Publié le 17/05/2021 à 11:40
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Fabrice Coquio (Interxion) - ©  D.R.

« Un data center n’est pas une unité de production de chauffage. Il produit de la calorie, mais à basse température, autour de 28 ou 29°C, non exploitable en l’état dans un réseau de chauffage à cause de la déperdition de chaleur. À terme, je vois 2 options. La 1e est liée à une proximité immédiate. Dans un rayon de moins de 2 km, un data center peut permettre un apport d’énergie à un process industriel. (…) La 2e option dépend de la taille des data centers. Plus ils seront importants, plus ils dégageront d’énergie », indique Fabrice Coquio
, président d’Interxion Interxion est un opérateur de data centers et hébergeur informatique international • Missions : conception, gestion et location d’espaces de stockage de données • Création : 1998 • Siège social … France SAS, le 17/05/2021.

Opérateur mondial, Interxion a construit en France plusieurs data centers en France, en région parisienne (4e hub mondial) et à Marseille (9e hub mondial), et programme de nouvelles infrastructures en 2021 et 2022. « Nous allons livrer la 1e tranche du site de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) en juillet 2021 où nous investissons 1,1 Md€ au total. Dans l’est parisien, sur la ZAC Zone d’aménagement concerté - procédure d’urbanisme qui permet aux collectivités ou aux établissements publics y ayant vocation, de réaliser ou de faire réaliser des opérations d’aménagement urbain Bel-Air à Ferrières-en-Brie (Seine-et-Marne) et dans le sud de Paris, dans un rayon de moins de 30 km de fibre, nous allons déployer de nouveaux sites en lien avec la nouvelle génération de fibre optique. À Marseille, nous construisons le 4e bâtiment (MRS4) sur le port, représentant un investissement de 120 M€ », déclare Fabrique Coquio.

L’entreprise a reçu les visites, le 03/05/2021, de Barbara Pompili Conseillère spéciale pour la planification écologique à l’international @ Secrétariat général de la planification écologique
• Née le 13 juin 1975 à Bois-Bernard (Pas-de-Calais)
, ministre de la Transition écologique, et de Cédric O
, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique, à Marseille (siège social d’Interxion France). « Les usines du XXIe siècle sont les data centers. Les infrastructures numériques sont donc essentielles mais elles doivent être pensées dans une planification urbaine et une action concertée entre secteurs public et privé, toujours en tenant compte de la notion de gravité des données », dit-il.

Fabrice Coquio répond aux questions de News Tank.


« Notre métier n’est pas de faire de l’immobilier ou de valoriser du foncier »

Interxion est le 1e opérateur mondial de data centers avec plus de 290 sites et 32 en cours de construction. En France, vous avez fait le choix d’investir prioritairement en Île-de-France et à Marseille. Pourquoi ces 2 régions en particulier ?

Notre géographie française est une chance. Paris fait partie des 4 premiers hubs internet mondiaux avec Londres, Amsterdam et Francfort. Marseille est le 9e hub mondial, devant Los Angeles, et bénéficie de l’arrivée majeure de câbles sous-marins aux capacités de trafic importantes, et également de câbles terrestres. Par son port maritime, Marseille est connectée avec 14 câbles sous-marins (le plus récent est le SEA-ME-WE5) à 43 pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie mais également d’Amérique. Dans la collecte et la distribution de la donnée, nous sommes dans une logique de hub et d’organisation centripète, un peu à l’image des flux de transport routier, ferroviaire ou aérien. Les données s’agrègent au sein de hubs avant de s’enrichir et d’être redistribuées grâce aux réseaux télécoms.

Dans le monde, 50 villes vont représenter 80 % des données »

Le rôle du data center est donc d’interconnecter divers systèmes (cloud, télécom, médias….) et infrastructures informatiques dans un environnement sécurisé et hyperconnecté. Internet ne concerne qu’une partie réduite des flux mondiaux, 80 % des échanges numériques sont davantage du « machine to machine » (M2M). Alors que le volume des données mondiales est multiplié par 6 tous les 10 ans, notre métier est de construire des infrastructures qui tiennent compte des enjeux de la gravité des données. Dans le monde, 50 villes vont représenter 80 % des données et des plateformes télécom, avec des temps de latence toujours plus réduits, de l’ordre de la milliseconde.

D’autres villes ou régions en France ont-elles intérêts à être dotées de data centers ?

Il ne faut pas confondre décentralisation de la data et logique de hub. Construire de nouveaux data centers dans toutes les villes de France ou des plateformes de cloud dans chaque région n’aurait aucun sens, même si certains opérateurs entretiennent la confusion.

Attention à ne pas investir dans des boucles qui ne servent à rien »

La sur-concentration électrique est nécessaire. Oui, il faut rétrofiter certaines salles en région devenues obsolètes, mais attention à ne pas investir dans des boucles qui ne servent à rien, là où il faut privilégier des radiales. Néanmoins, il y a 2 exceptions. Soit la verticalisation dans une logique de moyens de production dédiés, comme à Bordeaux, avec Cheops Technology, et à Reims, avec la société Ikoula. Soit la concentration dans des écosystèmes locaux, à Lille, Reims, Lyon ou Rennes, par exemple, où il peut se justifier d’investir.

Pourquoi cette réserve et cette mise en garde ?

Pour des raisons de valorisation boursière, d’actif immobilier ou de marketing politique, les data centers attisent certains appétits ou génèrent des fantasmes. De nombreuses initiatives sont aussi appâtées par l’obtention de fonds publics. Notre métier n’est pas de faire de l’immobilier, de valoriser du foncier ou de réhabiliter des friches. C’est un métier d’infrastructures au service de la donnée et de la connectivité. La question n’est pas « où construire un data center » mais « comment le remplir » pour qu’il soit optimal, y compris en termes de retour sur investissement.

Vous avez reçu la visite de Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, et Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique, le 03/05/2021 à Marseille. En termes d’aménagement du territoire, de projet d’infrastructures ou d’économie numérique, quelle message portez-vous ?

Nous sommes sollicités tous les jours car les usines du XXIe siècle sont les data centers. Les infrastructures numériques sont donc essentielles, mais elles doivent être pensées dans une planification urbaine et dans une action concertée entre secteurs public et privé, toujours en tenant compte de cette notion de gravité des données.

La bonne échelle, c’est la région »

La bonne échelle, c’est la région. Il faut éviter les actions individuelles et les investissements de court terme, le temps d’un mandat électoral par exemple. C’est le message que nous portons auprès des pouvoirs publics avec le syndicat France Datacenter, créé en 2006, en lien avec le Gimelec Groupement des entreprises de la filière électronumérique française . Nous devons expliquer et anticiper ce que seront les infrastructures numériques du XXIe siècle dans une géopolitique qui aura son importance.

À quelles obligations répondent les data centers en France ?

Nous répondons à 2 obligations, le permis de construire et l’autorisation ICPE Installations classées pour la protection de l’environnement, soumises à un régime d’autorisation, d’enregistrement ou de déclaration en fonction de l’importance des risques pour l’environnement. Ensuite, il existe plusieurs normes et certifications, de type APSAD (CNPP) ou le standard américain Uptime Institute, pour la sécurité incendie, l’anti-intrusion ou la télésurveillance…, sans obligation aucune. Sur nos sites Interxion, nous avons choisi d’aller au-delà de la norme APSAD R13 pour la détection et l’extinction incendie au gaz. Mais c’est au libre arbitre de chaque société.

Une activité encore jeune et en pleine croissance »

Nous sommes dans une activité encore jeune et en pleine croissance, issue d’un assemblage de plusieurs technologies, du génie électrique, du génie civil, de la sûreté, de la sécurité incendie… Le sinistre du site OVH à Strasbourg (incendie d’un site en mars 2021) va aussi faire bouger les lignes. Par exemple, nous souhaitons être reconnus par un code NAF dédié. Aujourd’hui, il n’existe pas et c’est un problème. Aux plans administratif et fiscal, nous sommes dans un entre-deux, qui ne facilite pas le dialogue avec l’administration en France.

Les sujets de la consommation d’énergie, des bilans thermiques et de l’efficience énergétique des data centers posent questions. Parmi elles, la chaleur dégagée par un site urbain peut-elle servir à des usages multiples ?

Un data center n’est pas une unité de production de chauffage. Il produit de la calorie, oui, mais à basse température, autour de 28 ou 29°C, non exploitable en l’état dans un réseau de chauffage à cause de la déperdition de chaleur.

Certains data centers font aujourd’hui plus de 40 000 m2 »

À terme, je vois 2 options. La 1e est liée à une proximité immédiate. Dans un rayon de moins de 2 km, un data center peut permettre un apport d’énergie à un process industriel, ce que nous testons à La Courneuve avec le groupe Paprec, dont un bâtiment jouxte notre équipement. La 2e option dépend de la taille des data centers. Plus ils seront importants, plus ils dégageront d’énergie. Certains data centers font aujourd’hui plus de 40 000 m2 et ont une puissance électrique de 130 MW. On voit des projets en Chine, aux États-Unis et au Portugal de plus de 100 000 m2 et supérieure à 300 MW.

Environ 1 % de la consommation d’énergie mondiale en 2019 »

Les enjeux énergétiques sont impressionnants et posent la question des ressources en énergie et en foncier. Au plan mondial, l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) rappelle que les data centers ont représenté environ 1 % de la consommation d’énergie mondiale en 2019. Si la croissance des usages avec le streaming, les réseaux sociaux, les visioconférences, jeux vidéo… est exponentielle, elle est décorrélée de la consommation énergétique des data centers. L'AIE Agence Internationale de l’Énergie prévoit en 2022, pour une augmentation de 60 % de la demande de services, une stagnation de la demande en énergie des data centers si les tendances actuelles sur l’efficacité des équipements et des infrastructures de data centers se poursuivent comme prévu.

Quels sont vos prochains projets en France et à quelles échéances ?

Nous allons livrer la 1e tranche du site de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) en juillet 2021, où nous investissons au total 1,1 Md€. Dans l’est parisien, sur la ZAC Zone d’aménagement concerté - procédure d’urbanisme qui permet aux collectivités ou aux établissements publics y ayant vocation, de réaliser ou de faire réaliser des opérations d’aménagement urbain Bel-Air à Ferrières-en-Brie (Seine-et-Marne) et dans le sud de Paris, dans un rayon de moins de 30 km de fibre, nous allons déployer de nouveaux sites en lien avec la nouvelle génération de fibre optique. À Marseille, nous construisons le 4e bâtiment (MRS4) sur le port, représentant un investissement de 120 M€.

Le dernier data center marseillais inauguré est le MRS3 en 2020, qui a pris place dans une ancienne base sous-marine de la 2de guerre mondiale, ayant des murs épais de 5,5 m. Créé par DK Architectes, le data center de dernière génération héberge une partie des bureaux marseillais d’Interxion France et 7 100 m2 d’espaces informatiques. MRS3 se caractérise par son l’utilisation de la technologie BIM en phase conception et de chantier. Ce processus de niveau 3 a conduit à la livraison d’un jumeau numérique de MRS3 en parallèle de la livraison de l’ouvrage. Le chantier a mobilisé jusqu’à 120 collaborateurs de Bouygues Bâtiment Sud-Est et Bouygues Énergies & Services lors de sa phase 1 achevée en juillet 2020 (mise en service du bâtiment). Interxion s’est installé à Marseille en 2015. La société a construit 3 data centers (MRS1 en 2015 dans le quartier de la Villette, MRS2 en 2018 sur la zone du bassin est du Grand port maritime et MRS3 en 2020). Un 4e (MRS4) est prévu en 2022.

Parcours

France Datacenter
Vice-président
Interxion France
Président
Sagem UK
Managing director

Établissement & diplôme

Eslsca Business School (École supérieure libre des sciences commerciales appliquées)
Diplômé

Fiche n° 43624, créée le 08/05/2021 à 08:00 - MàJ le 08/05/2021 à 08:29

Interxion

Interxion est un opérateur de data centers et hébergeur informatique international

• Missions : conception, gestion et location d’espaces de stockage de données
Création : 1998
Siège social  : Amsterdam
PDG : David C. Ruberg

• Réseau mondial : 280 data centers dans plus de 45 villes et 20 pays
• CA 2018 :
561,8 M€
• Président Interxion France SAS :
Fabrice Coquio
Data centers en France  : 10 (7 en Île-de-France et 3 à Marseille)
• Tél. :
01 53 56 81 70
• Fax :
01 42 67 42 02

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Catégorie : Cabinet d'expertise, études et ingénierie


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Fiche n° 10681, créée le 15/10/2020 à 02:11 - MàJ le 26/03/2021 à 17:49

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Fabrice Coquio (Interxion) - ©  D.R.