Politique de la ville : le rapport Borloo “Vivre ensemble, vivre en grand” remis au Premier ministre
« Vivre ensemble, vivre en grand », tel est le titre du rapport sur les quartiers remis par l’ancien ministre et créateur de l’Anru
Agence nationale pour la rénovation urbaine
, Jean-Louis Borloo, au Premier ministre le 26/04/2018 à Matignon.
Doubler le nombre d’apprentis et alternants en 3 ans dans les quartiers, créer une fondation nationale de financement de la rénovation urbaine, créer un fonds de 5 Md€ de la CDC dédié à la rénovation urbaine (dont 400 M€ de produits de TVA générés par le « redémarrage de la rénovation urbaine ») créer une cour permettant d’assigner l’État en manquement de ses obligations d’équité territoriale, créer une académie des leaders permettant de former les talents des quartiers pour « fertiliser la haute fonction publique » en renouvelant le modèle trop « consanguin » de l’ENA, telles sont les propositions phares annoncées par Jean-Louis Borloo à News Tank le 26/04/2018.
Le rapport, qui devait initialement être rendu au président de la République en déplacement aux États-Unis, a été remis au Premier ministre en amont des « états généraux de la ville » organisés à Paris le 26/04/2018, par l’association Bleu Blanc Zèbre et de nombreux élus, à la suite de l’appel de Grigny. Les arbitrages finaux sont attendus mi-mai 2018.
« Aucune inquiétude » sur le financement du plan
Concernant le plan remis au Premier ministre, l’ancien ministre Jean-Louis Borloo indique n’avoir « aucune espèce d’inquiétude. À chaque fois que quelque chose est robuste indiscutable, pertinent, il n’y a jamais de problèmes. »
La rénovation urbaine s’est arrêtée, « plus grand scandale » dû à la « désinvolture »
En revanche, cette affaire de rénovation urbaine est le plus grand scandale »
« En revanche, cette affaire de rénovation urbaine est le plus grand scandale. Enfin quelque chose qui a un peu métamorphosé les quartiers, qui a créé 40 000 emplois, qui est financé par les organismes HLM et sur lequel l’État met 3 %, ce qui est extrêmement dur à faire : démolir 150 000 logements, en reconstruire 150 000, “résidentialiser” 350 000 logements, réhabiliter 300 000, créer 30 kilomètres d’avenues, 300 équipements…
C’est juste le plus grand chantier civil de l’histoire qui faisait du bien à tout le monde, on a réussi à l’arrêter ! c’est essentiellement dû à la désinvolture »C’est juste le plus grand chantier civil de l’histoire qui faisait du bien à tout le monde, on a réussi à l’arrêter ! C’est essentiellement dû à la désinvolture, à la bureaucratisation de Bercy. Ils ont pris le pouvoir, ils ont supprimé le comité de suivi et d’évaluation que nous avions mis en place, ils ont transformé en agence d’état alors que c’était un tiers de confiance facilitateur au service des villes. C’est fou ! Ils ont même fait croire qu’ils avaient mis beaucoup d’argent, ce qui est grotesque. C’est payé par les HLM pour les HLM. On a aidé organisé, fédéré. Ça s’est arrêté, alors que cela a été voté à l’unanimité, sans que personne ne s’en rende compte. On a raconté pendant des années que l’on mettait 10 Md€ ici, 5 Md€ là, que l’on relançait un nouveau plan de rénovation urbaine en janvier 2014, mais pas une seule grue n’est arrivée dans les quartiers. »
Créer une fondation d’intérêt national dédiée à la métamorphose des quartiers délaissés ruraux, urbains et d’outre-mer
Je propose qu’on fasse une grande fondation d’intérêt national, appartenant au peuple de France, qui soit dédiée à la qualité urbaine, à la métamorphose urbaine de tous les quartiers »« Je propose qu’on fasse une grande fondation d’intérêt national, appartenant au peuple de France, qui soit dédiée à la qualité urbaine, à la métamorphose urbaine de tous les quartiers, mais aussi pour les villes moyennes dans des bassins en crise, les zones rurales qui connaissent les mêmes problématiques. Certains analystes ont réussi à opposer entre eux les territoires urbains et les territoires ruraux, alors que ce sont les mêmes problèmes. Il faut ajouter les DOM également. Nos sujets sont : les quartiers prioritaires, les DOM et les quartiers délaissés. C’est le même combat. »
Relancer l’apprentissage (doubler les recrutements dans les quartiers prioritaires en 3 ans)
Revenant sur la nécessité de mettre en place une « cité éducative », l’ancien ministre évoque l’objectif du rapport de doubler les recrutements supplémentaires en apprentissage et en alternance dans les quartiers en 3 ans (recruter 250 000 apprentis dont 100 000 dans les quartiers). Il évoque également la mise en place de campus numériques (200) dans les quartiers. « Il y a l’exigence pour les entreprises de respecter les obligations d’apprentissage. L’ancien plan c’était quoi ? Il y avait 10 programmes. Il y avait la rénovation urbaine qui, je le rappelle, a généré de nombreux emplois. Il y avait le plan apprentissage, nous avons doublé le nombre d’apprentis. Nous avions lancé le plan de services à la personne qui a créé 500 000 emplois en 3 ans. Il a aussi été arrêté. L’agence de service à la personne qui était soi-disant un monstre, avec 38 personnes salariées, chargée de s’adapter en permanence sur les nouveaux métiers, a aussi été arrêtée alors qu’il y a 150 000 personnes à Bercy, on l’a arrêté. »
Mettre en place une cour d’équité territoriale : « une révolution absolue »
Je demande qu’il y ait une nouvelle juridiction, la cour d’équité territoriale »« Je demande qu’il y ait une nouvelle juridiction, la cour d’équité territoriale. Tout le monde ment. À soi-même mais surtout aux autres. On a arrêté les plans de rénovation urbaine, on a arrêté les plans de services à la personne et le plan apprentissage. On continue pourtant à vouloir annoncer des chiffres en milliers et en millions. Cela s’appelle les »objectifs généraux« : on met un beau chiffre et ça fait complet. Il faut perdre cette habitude de la politique d’annonce des chiffres.
Par exemple, le chiffre de 48 Md€ qui m’a été attribué concernant le financement de ce plan est une ânerie. J’ai dit devant les élus à Dijon qu’il fallait relancer la rénovation. Or l’ancien plan représentait 48 Md€ de travaux, mais seulement 3 % de subventions de l’État. Pour ce plan, ce sera même moins puisque que je souhaite créer une fondation pour le financer.
Nous devons avoir une obligation de moyens »Nous devons avoir une obligation de moyens. On peut exiger par exemple de la CNAF qu’il n’y ait pas 4 fois moins de crèches dans les quartiers qu’ailleurs. Le cas échéant je peux saisir une juridiction, la cour d’équité territoriale, pour mettre en cause la CNAF. Cette proposition est une révolution absolue. On ne peut pas avoir aussi peu de magistrats ! C’est pour cela que je veux une haute cour capable de mettre en demeure le Gouvernement. »
Après la démission du maire de Sevran, avez-vous réellement empêché une dizaine de maires de démissionner ?
« Une dizaine non. Après la démission de Stéphane Gatignon, plusieurs maires ont souhaité démissionner. C’est une affaire sérieuse. On parle de 10 millions d’habitants concernés. 6 millions dans ce que l’on appelle vraiment les quartiers et autour, ainsi que les territoires d’essai, les villes moyennes dans des bassins qui vont très mal et une partie des DOM. »
Création d’une Académie des territoires
« Il s’agit surtout de la jeunesse disponible de la France qui est bourrée de talent. Je propose l’Académie des leaders qui est la nouvelle grande école. Ce sera la plus grande école française. L’idée est de développer un mécanisme gagnant-gagnant. Ce n’est plus possible de formater les étudiants. Il faut créer, comme dans toutes les grandes universités mondiales, des sélections sur le leadership, l’habileté, l’ouverture au monde, l’ouverture aux autres, le travail en équipe, en projet.
Nous commencerons le recrutement d’abord dans les quartiers »La première promotion sera de 500 élèves. J’en prévois une tous les 6 mois qui sera très strictement sélectionnée. Nous commencerons le recrutement d’abord dans les quartiers, en élargissant par la suite.
La haute fonction publique doit être fertilisée par tous ces talents »Cette académie des territoires sera ouverte sans condition de diplôme, pour tous les français. Lorsque De Gaulle lance l’ENA sur une idée de Jean Zay en 1936, c’est une étape : il vise la méritocratie. Mais c’est devenu trop formaté, trop consanguin. Cela ne veut pas dire que les personnes qui en sont issues ne sont pas de qualité, mais la haute fonction publique doit être fertilisée par tous ces talents.
Ils bénéficieront des meilleurs modules français et européens »Ils bénéficieront des meilleurs modules français et européens : ils iront faire du droit public à Sciences Po, des finances à HEC, de l’urbanisme dans les meilleures écoles d’urbanisme, il y aura l’EPITECH pour le digital… Ils seront donc ultra-formés. Ils auront le statut de stagiaires de l’ENA, c’est-à-dire payés 1 700 € dès qu’ils sont reçus, avec 2 ans et demi de formation elle-même payée, et une obligation de service de 10 ans à l’État, éventuellement remboursable. Il n’y aura pas de site physique puisque la formation se déroulera dans toutes les écoles que je vous ai citées. »
L’Agence nationale des territoires
« L’Agence nationale des territoires, je ne sais pas ce que c’est. Je suis pour la mise en place de 19 programmes. Finalement, l’État est un acteur, certes majeur, mais ce n’est pas le seul. C’est pour cela qu’on a signé le pacte de Dijon le 06/04/2018 avec les métropoles. Il y a la CNAF aussi et de nombreux acteurs. »
Parcours
Président
Président
Député du Nord (21e circonscription)
Coprésident puis président
Ministre d’État
Président
Ministre
Ministre
Ministre
Ministre
Maire
Président
Fiche n° 28900, créée le 19/02/2018 à 08:45 - MàJ le 19/10/2023 à 14:10