Logement : aux besoins croissants s’accumulent les besoins non satisfaits (Iñaki Echaniz, député)
La crise sanitaire et le contexte inflationniste ont accentué une crise de l’offre observée depuis plusieurs années qui se caractérise par une augmentation des prix (de l’ordre de 36 % dans les grandes villes entre 2007 et 2020) et s’explique par la baisse du nombre de constructions de logements neufs. Aux besoins croissants s’accumulent les besoins non satisfaits. En zones tendues, la situation est accentuée par un nombre de logements moins disponibles pour de l’habitation principale et un recul des constructions avec, en 2019, une diminution de 14 % d’autorisations de construire et un décrochage pour le logement social. Il apparaît indispensable de répondre aux besoins prioritaires dans les territoires, où la demande est la plus forte, par des mesures de promotion de la construction, de densification urbaine et d’optimisation du taux d’occupation des lieux habitables, écrit Iñaki Echaniz
Député des Pyrénées-Atlantiques (4e circonscription) @ Assemblée nationale
, député (PS) des Pyrénées-Atlantiques, dans une tribune adressée à News Tnk le 29/06/2023.
En premier lieu, il faut donner aux collectivités des outils lisibles, sécurisés et incitatifs afin d’orienter l’usage du parc existant et d’encourager la production de logements. Pour mieux réguler l’accès aux logements, les collectivités doivent pouvoir bénéficier de moyens pour réduire la part des résidences secondaires, des meublés de tourisme et des logements vacants dans les zones les plus tendues, par des politiques fiscales désincitatives, des outils de régulation leur permettant de dédier des zones à l’habitat principal et un soutien à la mobilisation, la rénovation ou la réversibilité des structures, comme les bureaux, sous-employés avec le développement du télétravail.
Voici la tribune d’Iñaki Echaniz qui interviendra aux Entretiens d’Inxauseta à Bunus (Pyrénées le 28/08/2023 lors de la table ronde « Quelle production nouvelle pour limiter l’impact sur le climat et les prix ? ».
Indispensable de répondre aux besoins prioritaires dans les territoires
La Commission Rebsamen pour la relance durable de la construction de logements (2021) et plus récemment les conclusions du Conseil national de la refondation (2023) ont alerté sur la pénurie de logements qui va s’accentuer dans les années à venir, notamment en zones tendues. Tout comme il est urgent de mobiliser le stock de logements disponibles, il est majeur de prendre des mesures efficaces pour rattraper le retard de constructions, alors que la France a construit 375 000 logements en 2022, contre 500 000 nécessaires, et répondre aux défis sociaux et économiques que traverse le secteur.
Besoins croissants et besoins non satisfaits »La crise sanitaire et le contexte inflationniste ont accentué une crise de l’offre observée depuis plusieurs années, qui se caractérise notamment par une augmentation des prix (de l’ordre de 36 % dans les grandes villes entre 2007 et 2020) et s’explique en particulier par la baisse du nombre de constructions de logements neufs. Aux besoins croissants s’accumulent les besoins non satisfaits. En zones tendues, la situation est accentuée par un nombre de logements moins disponibles pour de l’habitation principale et un recul des constructions avec, en 2019, une diminution de 14 % d’autorisations de construire et un décrochage pour le logement social. Il apparaît indispensable de répondre aux besoins prioritaires dans les territoires où la demande est la plus forte, par des mesures de promotion de la construction, de densification urbaine et d’optimisation du taux d’occupation des lieux habitables.
Donner aux collectivités des outils lisibles, sécurisés et incitatifs
En premier lieu, donner aux collectivités des outils lisibles, sécurisés et incitatifs afin d’orienter l’usage du parc existant et d’encourager la production de logements nouveaux.
Pour mieux réguler l’accès aux logements, les collectivités doivent pouvoir bénéficier de moyens pour réduire la part des résidences secondaires, des meublés de tourisme et des logements vacants dans les zones les plus tendues, par des politiques fiscales désincitatives (surtaxe d’habitation et déliaison des taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et de la taxe foncière, suppression de la niche fiscale airbnb…), des outils de régulation leur permettant de dédier des zones à l’habitat principal et un soutien à la mobilisation, la rénovation ou la réversibilité des structures, comme les bureaux, sous-employés avec le développement du télétravail.
Guichet unique et mobilisation supplémentaire de fonds »Pour densifier l’espace urbain et optimiser la construction sur des terres artificialisés, des outils existent et doivent être encouragés. À ce titre, le Fonds friche constitue un instrument bienvenu qu’il serait pertinent de renforcer par l’augmentation du nombre d’agents de l’État dédiés à son déploiement et l’adéquation de son enveloppe financière aux coûts réels des chantiers. En effet, le coût important des travaux et la technicité nécessaire à la formulation de projets, peuvent décourager les collectivités face au manque de rentabilité, exclure les communes les moins bien dotées financièrement et écarter des projets d’envergure. Un guichet unique et une mobilisation supplémentaire de fonds permettrait une utilisation plus efficace et plus équitable de cette aide.
L’encadrement du prix du foncier apparaît nécessaire
Plus largement, alors que la nécessaires constitution de réserves foncières préoccupe de plus en plus de collectivités, l’encadrement du prix du foncier apparaît nécessaire pour contrer la spéculation immobilière et soutenir l’investissement public et privé. Pour rappel, le prix de la terre représente entre 25 % et 50 % du coût total d’un projet et ces chiffres ont triplé en 20 ans.
Encadrer les prix faciliterait également le développement de logements sociaux alors que 2,4 millions de ménages sont en attente. En parallèle, la loi SRU Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, du 13/12/2000, dont l’article 55 impose un quota de 25 % de logements sociaux en 2025, dans chaque commune de 3 500 habitants doit être renforcée en relevant le seuil de l’obligation de production de ces logements à 30 %, avec des sanctions rehaussée en cas de non- respect des objectifs fixés et en substituant les préfets aux maires défaillants.
Baisser la TVA sur ce type d’ouvrage »Pour promouvoir le logement social et écologique, baisser la TVA Taxe sur la valeur ajoutée sur ce type d’ouvrage donnerait un cap au secteur. Les incitations à l’utilisation de matériaux écologiques (biosourcés, géosourcés et de réemploi) augmenteraient, à terme, le volume de production de ces matériaux et donc la baisse de leur coût, tout en générant de nouvelles habitudes chez les constructeurs. Les architectures bioclimatiques, Low tech, pour lutter contre la précarité énergétique (été comme hiver) des bâtiments pourraient également bénéficier de mesures incitatives. Rappelons que des logements plus écologiques ont un impact bénéfique sur notre économie et notre environnement (baisse des factures d’électricité, de la pollution, de l’utilisation de nouvelles ressources, entreprises locales encouragées).
Les ménages prennent aussi toute leur part dans la politique de construction de logements de notre pays. Les plus modestes et les classes moyennes doivent pouvoir accéder à la propriété. Le prêt à taux zéro constituait à ce titre un outil efficace pour la participation de ces publics à la construction de logements neufs, sa limitation récente aux zones tendues, les plus inabordables, va priver, voir annuler des projets immobiliers dans un contexte où les coûts de construction sont en hausse et les taux d’intérêt dépassent les 3 %. L’APL Aides personnelles au logement correspondant à 3 types d’aides : l’aide personnalisée au logement, l’allocation de logement à caractère familial et l’allocation de logement à caractère social accession, supprimée en 2018, représentait également une solution pour diminuer la charge de l’emprunt, soutenir la construction et l’accession. Mettre fin à ces aides dans une période particulièrement complexe en matière d’accès aux logements n’est pas un bon signal. Il faut remobiliser ces outils et les élargir pour bénéficier à un public qui n’a plus les moyens d’acheter, notamment dans les grandes villes ou sur les littoraux.
Inciter les ménages plus aisés à investir
Inciter les ménages plus aisés à investir pour la construction de logements avec un dispositif Pinel complètement repensé, assez attractif tout en étant moins onéreux pour les finances publiques via un système de contingentement et d’adaptation aux besoins locaux, pourrait également être pertinent, ainsi que le préconise l’Inspection Générale des Finances.
Nécessaire limitation de l’artificialisation de nos sols »Déductions fiscales, aides à la rénovation énergétique, multiplication de fonds spécifiques, notre pays a créé des outils pour soutenir l’émergence de nouveaux logements (neufs ou rénovés). Tout comme l’arrivée de nouveaux services publics et infrastructures, ces aides contribuent à améliorer la qualité du parc et de son environnement et ainsi, d’accroitre la valeur des biens immobiliers. L’éventuelle plus-value tirée de la vente de ces biens et générée par des investissements publics devraient être légitimement imposée et redistribuée à la collectivité comme le suggère le CNR Conseil national de la refondation - grande consultation publique dans le cadre du CNR lancé par le chef de l’État le 08/09/2022 .
Une politique de stimulation des constructions ne doit cependant pas invisibiliser la nécessaire limitation de l’artificialisation de nos sols qui nous impose d’encourager l’habitat collectif. En ce sens, nous pourrions nous inspirer de nos voisins européens pour mobiliser plus largement des outils innovants, comme les coopératives d’habitation. Ce dispositif constitue un moyen de mutualiser les coûts de construction et de gestion, dans un système sans but lucratif, où les sociétaires-locataires possèdent des parts sociales, payent au prix coûtant et prennent des décisions collégiales.
Un outil alternatif, anti-spéculatif, complémentaire au Bail Réel Solidaire qu’il est également important d’encourager largement.
Rubrique dirigée par Jean-Luc Berho
La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La prochaine édition a lieu le 25/08/2023 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur le thème de l’urgence à agir. Jean-Luc Berho est président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.
Iñaki Echaniz
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Fiche n° 49141, créée le 04/05/2023 à 18:04 - MàJ le 06/09/2024 à 14:19