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Logement : se donner la capacité collective de resolvabiliser notre clientèle (J. de Roujoux, Nexity)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°313513 - Publié le 02/02/2024 à 14:00
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Julie de Roujoux - ©  D.R.

À quoi ressemblera 2024 ? S’il est évident que la production de logements devrait atteindre un point bas étant donné la baisse continue des autorisations de construire depuis plus de 5 ans (si on met entre parenthèse l’effet de rattrapage post-Covid), l’attention des professionnels du logement va porter, avant tout, sur leur capacité collective à re-solvabiliser leur clientèle, écrit Julie de Roujoux Présidente @ Groupe Alsei
, directrice générale déléguée de Nexity • Groupe immobilier français coté en bourse • Création : 2000 • Activités : aménageur ; promoteur ; immobilier résidentiel (coliving) ; immobilier d’entreprises (coworking) ; services immobiliers… Immobilier résidentiel, dans une tribune adressée à News Tank le 30/01/2024.

À l’aube de cette nouvelle année, divers éléments d’analyse doivent permettre aux acteurs de la fabrique de la Ville de tirer les enseignements de cette période inédite pour faire évoluer leurs pratiques de production de logement et, plus largement, des espaces bâtis. Car cette crise ne doit pas nous faire oublier, à nous professionnels de l’immobilier, l’impérieuse nécessité de réorienter les modes de production pour limiter notre empreinte environnementale.

Voici la tribune de Julie de Roujoux.


Tirer les enseignements de cette période inédite

2023, année noire pour le logement. Mais à quoi ressemblera 2024  ? S’il est évident que la production de logements devrait atteindre un point bas, étant donné la baisse continue des autorisations de construire depuis plus de 5 ans (si on met entre parenthèse l’effet de rattrapage post-Covid), l’attention des professionnels du logement va porter avant tout sur leur capacité collective à re-solvabiliser leur clientèle. 

Crise de la demande et crise de l’offre »

À l’aube de cette nouvelle année, voici quelques éléments d’analyse qui doivent permettre aux acteurs de la fabrique de la Ville de tirer les enseignements de cette période inédite pour faire évoluer leurs pratiques de production de logement et, plus largement, des espaces bâtis. Car cette crise ne doit pas nous faire oublier, à nous professionnels de l’immobilier, l’impérieuse nécessité de réorienter les modes de production pour limiter notre empreinte environnementale. C’est un enjeu sociétal majeur que Nexity, en tant que premier promoteur bas carbone de France, a pris à bras le corps depuis plusieurs années. La crise actuelle que traverse le secteur du logement est sans précédent de par son ampleur et de par sa nature. Nous traversons à la fois une crise de la demande et une crise de l’offre.

Crise de la demande tout d’abord, qu’il s’agisse des particuliers ou des institutionnels : la remontée fulgurante des taux d’intérêt entre mi-2022 et fin 2023, qui sont passés de 1,1 % à 4,5 % a eu pour conséquence de baisser le pouvoir d’achat immobilier des français de 25 %. Il n’existe aucun secteur économique qui ait connu un tel effondrement des capacités financières de ses clients.

Rêve de l’accession à la propriété inaccessible

Les ventes de logements neufs au détail ont baissé de près de 40 % entre fin 2022 et fin 2023. Le rêve de l’accession à la propriété devient inaccessible pour grand nombre de nos concitoyens. Les institutionnels privés qui commençaient à se ré-intéresser au logement depuis 2015 s’en détournent devant le manque de rentabilité de ce segment, qui plus est plus complexe à gérer, en comparaison d’autres actifs financiers. Le montant investi par les institutionnels privés a chuté de 60 % entre les neuf premiers mois de 2022 et les neuf premiers mois de 2023, selon la dernière étude de Knight Frank  • Société internationale de conseil en immobilier • Création : 1975 (Knight Frank France) • Missions : Knight Frank France est organisée autour de 6 lignes de métier : bureaux, commerce… France.

Seuls les bailleurs sociaux ont continué à investir, en intensifiant leurs investissements sur le logement intermédiaire à l’image des grands plans d’investissement de la CDC Caisse des dépôts et consignations - Institution financière publique qui assure un service d’intérêt général et de développement économique pour le compte de l’État français et des collectivités et d’Action Logement • Action Logement Services est une SA dont le seul actionnaire est Action Logement groupe. • Missions : collecter la Participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) et distribuer les… annoncés au printemps 2023. Cette crise de la demande se cumule à une crise de l’offre, alimentée par différents facteurs : l’anticipation désordonnée de la mise en œuvre de la loi ZAN Zéro artificialisation nette - Objectif de réduction de la consommation d’espace à zéro unité nette de surface consommée en 2050, fixé par le plan Biodiversité du Gouvernement en juillet 2018 et la volonté de maitrise accrue du développement de leur commune de la part des élus.

Largement engagés sur la voie de la régénération urbaine »

L’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN), sacralisé dans la loi Climat et résilience d’août 2021 (dont les décrets et arrêtés viennent seulement d’être publiés), ont eu un effet psychologique majeur sur les décisions d’un grand nombre d’édiles qui, devant la pression de l’opinion publique et devançant par là-même le rythme imaginé par l’État, ont freiné, gelé, voire abandonné, par principe de précaution, un grand nombre de projets. Cette loi est indispensable si nous voulons agir de manière forte sur le changement climatique et faire perdurer un environnement vivable sur le territoire français. Les professionnels de l’immobilier doivent apprendre à travailler avec et le font déjà : l’ensemble des grands acteurs de la promotion sont largement engagés sur cette voie de la régénération urbaine et une majeure partie de leur production est réalisée sur des terrains déjà urbanisés et ou artificialisés.

La densité, contrepartie de la loi ZAN

Un autre point mérite d’être soulevé si l’on souhaite concilier objectif ZAN et production de logement à la hauteur des besoins des zones les plus attractives : l’impérieuse nécessité de densifier d’une part les centres-villes, qui bénéficient de tous les services et aménités (y compris, dans la majorité des cas d’un réseau de transport en commun foisonnant et densément maillé) et, d’autre part, la frange périurbaine accolée à ces centres.

À nous professionnels de faire preuve de pédagogie »

Cette question de la densité est absente du débat public et des orientations dessinées par le législateur. Cela doit être pourtant la contrepartie de la loi ZAN. L’un des pièges est d’avoir assimilé dans l’imaginaire collectif densité à l’urbanisme de dalle et aux grands ensembles, modèles de fabrique de la ville qui ont démontré leurs limites et qui sont totalement rejetés par l’opinion publique. À nous professionnels, promoteurs, architectes, urbanistes et aménageurs de faire preuve de pédagogie pour démontrer qu’il existe des formes et des niveaux de densité « heureuse », compatibles avec nos modes de vie actuels, loin de ces images d’Épinal datées.

La crise de l’offre, nous la constatons tous les jours : c’est plus d’une dizaine de milliers d’étudiants qui ont dû renoncer à une formation faute de logement, ce sont près de 800 000 ménages qui attendent un logement social en ile de France avec un délai d’attente supérieur à 10 ans, ce sont des entreprises de plus en plus nombreuses qui peinent à recruter faute de logements décents, ce sont des services publics qui se détériorent faute de logements à proximité pour leurs agents (école, hôpital…). Sans parler de l’incapacité à décohabiter pour de jeunes actifs et des couples récemment divorcés. Les journaux sont remplis d’exemples criants : des mises en location qui suscitent un millier de demandes en quelques heures, des mobile home mis en service par manque de logements…

Travailler les coutures urbaines et les interstices

Le logement neuf doit donc redevenir abordable, durable et abordable. Cet enjeu, nous l’avons fait nôtre chez Nexity et cela passe par trois grandes familles d’actions :

  • la reconstruction de la Ville sur la Ville,
  • l’intensification de l’usage des bâtiments,
  • des méthodes constructives et des produits immobiliers plus frugaux en empreinte carbone et en consommation énergétique.
Le gisement foncier est gigantesque »

La reconstruction de la Ville sur la ville tout d’abord. Il ne s’agit plus de faire table rase du passé mais de composer avec le déjà-là. La fabrique urbaine doit s’appliquer à travailler les coutures urbaines et densifier les interstices. Nexity l’a compris depuis longtemps et c’est pour mettre en avant ce savoir-faire et intensifier son action qu’elle a créé la marque Nexity Heritage. Le gisement foncier est gigantesque (sur les 21 plus grandes aires urbaines, 55 000 hectares seraient mobilisables selon une étude de la Caisse des dépôts Groupe public, investisseur de long terme au service de l’intérêt général et du développement économique de la France. • Filiales : La Poste, Icade, Egis, Transdev, RTE, SFIL, GRTGaz, Compagnie des… ). L’enjeu est majeur pour les villes qui doivent y implanter les services publics en quantité suffisante (des écoles notamment) pour pouvoir créer de véritables quartiers.

Nos métiers sont en train d’évoluer

Parmi les exemples les plus frappants, le partenariat conclu entre Carrefour et Nexity est significatif de cette nécessité de construire la ville avec le déjà-là. Ce partenariat inédit va conduire au plus grand mouvement jamais enregistré de mutations de tènements commerciaux. La friche commerciale est au XXIe siècle ce que la friche industrielle est au XXe, la qualité architecturale et patrimoniale en moins. Faire évoluer ces entrées de ville disgracieuses pensées à l’époque du « tout voiture » pour les transformer en quartiers mixtes (les commerces, services et les transports sont déjà là !) et apaisés, voilà un programme réjouissant. Carrefour et Nexity vont engager la mutation de 76 sites sur tout le territoire national pour créer 12 000 logements en 10 ans.

Les opérations immobilières deviennent, par là-même, de plus en plus complexes. Les compétences changent. En même temps que le métier du promoteur, ce sont les métiers de nombreux acteurs qui sont en train d’évoluer : l’architecte, les bureaux d’étude, les notaires, les commercialisateurs… Il est frappant de voir dans les revues spécialisées et les prix d’architecture la place prise par les projets de réhabilitation et de restructuration. De nouveaux métiers émergent, que ce soit ceux liés au réemploi des matériaux, à la concertation et la co-construction des projets urbains ou à l’urbanisme transitoire.

Souplesse des liens contractuels entre bailleur et utilisateur

Le 2e axe de travail est l’intensification des usages du bâti, par une utilisation plus intense du bâti construit. Comme pour d’autres secteurs d’activité, la tendance est à l’évolution de la propriété vers l’usage, qui permet de diversifier les activités et les usages au sein d’un même bâtiment mais également les usagers. Cela implique une souplesse accrue des liens contractuels entre bailleur et utilisateur, ce que les baux commerciaux et d’habitation classiques ne permettent pas.

C’est pour répondre à ce nouveau besoin que les concepts de coworking et de coliving sont apparus et sont déclinés aujourd’hui pour satisfaire les attentes de publics variés. Nexity s’est positionné très tôt sur le segment de marché de l’immobilier opéré et compte dans son écosystème les entreprises Morning Coworking et Hiptown • Start-up, opérateur de bureaux • Activités : Coworking et bureaux flexibles et opérés partout en France, offre sur-mesure de valorisation et d’aménagements d’espaces de travail• Création … côté services aux entreprises ; et Studea et Urban Campus côté solutions de logement. Si l’on regarde de plus près ce marché, de nombreux concepts voient le jour pour répondre à des situations spécifiques pour lesquelles le logement classique n’apporte pas de réponse adaptée : seniors, étudiants, chercheurs et jeunes actifs, actifs en mobilité, mais aussi personnes divorcées…

Construction hors site et compétitivité »

Le 3e axe de travail est la nécessaire diminution simultanée de l’empreinte carbone et du coût de construction du logement. Nexity est engagé dans ce mouvement depuis plusieurs années, avec sa ligne de produit Ywood notamment. Nexity a déjà construit, depuis 2016, plus de 1 million de m2 de logements BBCA Bâtiment Bas-Carbone . Mais nous souhaitons aller plus loin en favorisant la massification de la construction hors site 3D. Ce mode constructif, répandu dans le monde anglo-saxon et les pays nordiques, est encore confidentiel en France, notamment à cause de son coût élevé. Cependant, le contexte actuel fait bouger les lignes. Les difficultés auxquels sont confrontés les acteurs de la construction traditionnelle renchérissent leur prix de revient : difficulté de recrutement du secteur de la construction, baisse de la qualité, augmentation des délais de construction dans un contexte de hausse des taux d’intérêt… La construction hors site devrait retrouver de la compétitivité donc, émerger de façon beaucoup plus massive. Elle sera un vecteur majeur de baisse des nuisances de chantier. C’est le sens du partenariat de Nexity avec Tophat conclu en 2023.

Produire du logement durable et abordable

Ce mouvement a de nombreux impacts sur la chaine de production de logements qu’il est nécessaire d’accompagner, à commencer par la question architecturale : quelle écriture permet de concilier industrialisation et volonté des élus. La place de l’urbaniste et de  l’architecte, véritables tiers de confiance entre les élus et le habitants d’une part et les professionnels de l’immobilier d’autre part, est essentielle dans ce dispositif mais doit se réinventer à l’aune de ces nouvelles méthodes constructives. D’autres enjeux doivent être approfondis : l’environnement règlementaire et assurantiel notamment. Ces trois axes doivent permettre poursuivre l’objectif impérieux de produire du logement durable et abordable.

Accompagner l’orientation de la demande »

Afin d’accélérer ce mouvement, il est du devoir de la puissance publique d’accompagner ces transitions. Favoriser l’acquisition de logements performants au plan énergétique. Comme l’État a accompagné, en son temps, l’émergence des véhicules électriques, il devrait accompagner l’orientation de la demande de logements vers des logements sobres au plan énergétique, alors que son action se limite à la rénovation, dont l’impact en termes de volumes remis sur le marché reste trop faible (quelques milliers de logements sur l’ensemble du territoire national) en comparaison du besoin annuel de logements. Pour rappel, rien qu’en Ile-de-France, la loi du Grand Paris fixe un objectif de 70 000 logements produits chaque année.

Pour des modèles autres que la pleine propriété ou la location

L’État pourrait créer les conditions législatives et réglementaires facilitant le recours au tiers-financement des équipements énergétiques au sein des copropriétés (nouvelles ou existantes) alors que ce système de financement existe déjà pour les propriétaires institutionnels.

Plus largement, la puissance publique doit enfin permettre de faire émerger des modèles autres que la pleine propriété ou la location. Le mécanisme du Bail réel solidaire (BRS Bail réel solidaire - Créé par la loi ALUR : le ménage est propriétaire de sa maison mais locataire du terrain. Contient des clauses de prix de revente et des plafonds de ressources des acheteurs ) est un exemple intéressant qu’il doit contribuer à massifier. Ce mécanisme pourrait servir de modèle à des systèmes valables dans la sphère privée et pas seulement sociale. Plusieurs entreprises se sont créées dernièrement pour tester divers business model. L’État devrait s’y intéresser et les accompagner. Côté marché locatif, l’État doit permettre le regain d’attractivité et de rentabilité pour les investisseurs (institutionnels ou particuliers privés). 

Enfin, s’agissant de la construction hors site, l’État doit favoriser l’implantation d’usines dédiées à ce secteur d’activité, en prenant part aux investissements via ses différentes bras armés mais également en créant les conditions permettant d’assurer une production minimale. Sans cette visibilité de marché, les investisseurs privés ne s’intéresseront pas à ce secteur. Pour créer les conditions favorables, l’État doit inciter les collectivités locales à produire du logement via ce mode constructif, à rendre les clients particuliers finançables, soutenir le et le logement attractif pour les investisseurs privés.

Quel que soit l’angle sous lequel le logement est scruté, la question de son financement est définitivement au centre du débat. À la puissance publique de l’orienter vers une plus grande durabilité de la fabrique de la Ville à travers une politique du logement ambitieuse et cohérente.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La dernière édition a eu lieu le 25/08/2023 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur le thème de la transition écologique et du logement pour tous. Jean-Luc Berho est président du conseil de surveillance de la Coopérative de l’immobilier à Toulouse, administrateur de l’association Aurore, administrateur d’Espacité et membre du Conseil National de l’Habitat. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Julie de Roujoux


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Parcours

Groupe Alsei
Présidente
Nexity
Directrice générale déléguée pôle Immobilier résidentiel
Groupe Pichet
Directrice Générale de la promotion
Bouygues Immobilier
Directrice générale des partenariats

Établissement & diplôme

École d’architecture de la ville et des territoires Marne-la-Vallée
Architecte DPLG
Corps des Ponts, des Eaux et des Forêts
Ingénieure
École polytechnique (X)
Diplômée

Fiche n° 34003, créée le 28/01/2019 à 20:27 - MàJ le 08/07/2024 à 20:49

Nexity

• Groupe immobilier français coté en bourse
• Création : 2000
• Activités : aménageur ; promoteur ; immobilier résidentiel (coliving) ; immobilier d’entreprises (coworking) ; services immobiliers aux particuliers et entreprises
• Fondateur : Alain Dinin
• Pdg : Véronique Bédague
• Chiffre d’affaires (2023)  : 4,3 Md€ ; (2022) : 4,7 Md€
• Implantations : France, Allemagne, Pologne, Italie, Belgique, Espagne, Suisse
• Effectif (fin 2023) : 8 185 salariés
• Directrice de la communication : Anne Gindt
Contact : Cyril Rizk, responsable des relations presse
Tél. : 01 85 55 32 35


Catégorie : Promoteur et constructeur


Adresse du siège

19, rue de Vienne - TSA 50029
75801 Paris Cedex 08 France


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Fiche n° 6340, créée le 24/01/2018 à 17:07 - MàJ le 25/11/2024 à 15:40

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