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« Aménagement du territoire et logement fléchés comme vecteurs de solutions » (J. Ferrand, Néolia)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°215481 - Publié le 23/04/2021 à 11:30
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Jacques Ferrand (Néolia) - ©  D.R.

L’histoire des organismes de logement social est un étonnant prisme sociétal de nos territoires. Elle en épouse les contours toujours mouvants, en révèle les variations profondes et les grands élans, les frémissements les plus subtils, autant que les marches arrière et autres revirements parfois brutaux, écrit Jacques Ferrand Membre du comex @ Union sociale pour l’habitat (USH) • Directeur général @ SACHA (SAC avec Habitat 25) • Trésorier @ Fédération des ESH
, directeur général de Néolia, dans une tribune adressée à News Tank le 21/04/2021.

En 40 ans, les modes de consommation et l’outil industriel évoluent, et avec eux, les métiers et les pôles d’attractivité muent et se déplacent. On réinvestit les campagnes périphériques en créant des lotissements qui réalisent le rêve absolu de la maison individuelle. D’autres font le choix de l’ancien au bénéfice d’un retour en grâce des centres-villes. Quant aux quartiers autrefois si florissants, ils se dépeuplent. Des fractures sociales se forment et se creusent. Des crevasses bientôt purulentes sur lesquelles se braquent les objectifs de l’opinion publique jusqu’à faire (trop souvent) l’ouverture du 20 h à la télé. Chômage, insécurité, trafics, violence, radicalisation : nos quartiers cristallisent tous les maux et deviennent du même coup terrains d’intentions et d’expressions politiques tous azimuts et parfois extrêmes. Nos quartiers sont malades. Soit. Pour autant, ils ont des talents. Les pouvoirs publics se mobilisent donc à leur chevet. L’affaire est sérieuse. Bouillonnante. Menaçante.

Dans les hautes sphères du pouvoir, on se concerte et on phosphore pour déployer de quoi panser, désinfecter, endiguer l’hémorragie, recoudre, cicatriser. L’aménagement du territoire et le logement sont ici fléchés comme vecteurs de solutions. À la bonne heure !

Voici la tribune de Jacques Ferrand.


Entre national et local, agir en confiance, dans la durée au bénéfice des habitants des quartiers 

L’histoire des organismes de logement social est un étonnant prisme sociétal de nos territoires. Elle en épouse les contours toujours mouvants, en révèle les variations profondes et les grands élans, les frémissements les plus subtils, autant que les marches arrière et autres revirements parfois brutaux.

Comme chacun sait, cette histoire du logement social puise ses racines dans le besoin massif et donc l’afflux, tout aussi massif, de main d’œuvre aux périmètres de nos villes pour reconstruire la France et l’Europe d’après-guerre. Une main d’œuvre qu’il faut évidemment loger au plus vite et dans les meilleures conditions. Ce que nous faisons à grand renfort de HLM qui, à l’époque, offrent un niveau de confort et de modernité souvent inégalés et donc très prisés. Autant de tours et de barres qui signent, aujourd’hui encore, l’identité de bon nombre de nos quartiers.

Du fol engouement au désamour

À ces grands mouvements migratoires et démographiques succède une longue période de relative stabilité avant que s’amorce un inexorable déclin. En cause : le fléchissement de la population pour certains territoires et la chute d’attractivité de ces quartiers pour d’autres secteurs moins affectés démographiquement.

Tout naturellement, en 40 ans, les modes de consommation et l’outil industriel évoluent, et avec eux, les métiers et les pôles d’attractivité muent et se déplacent. On réinvestit les campagnes périphériques en créant des lotissements qui réalisent le rêve absolu de la maison individuelle. D’autres font le choix de l’ancien au bénéfice d’un retour en grâce des centres-villes.

Panser les quartiers

Quant aux quartiers autrefois si florissants, ils se dépeuplent. Des fractures sociales se forment et se creusent. Des crevasses bientôt purulentes sur lesquelles se braquent les objectifs de l’opinion publique jusqu’à faire (trop souvent) l’ouverture du 20 h à la télé.

Chômage, insécurité, trafics, violence, radicalisation : nos quartiers cristallisent tous les maux et deviennent du même coup terrains d’intentions et d’expressions politiques tous azimuts et parfois extrêmes. Nos quartiers sont malades. Soit. Pour autant ils ont des talents. Les pouvoirs publics se mobilisent donc à leur chevet. L’affaire est sérieuse. Bouillonnante. Menaçante.

Dans les hautes sphères du pouvoir, on se concerte et on phosphore pour déployer de quoi panser, désinfecter, endiguer l’hémorragie, recoudre, cicatriser. L’aménagement du territoire et le logement sont ici fléchés comme vecteurs de solutions. À la bonne heure !

Le grand balancier politique

Des politiques-outils se décrètent et se superposent : DSQ Développement social des quartiers , QPV Quartiers prioritaires de la politique de la ville , ANRU Agence nationale pour la rénovation urbaine , NPRU Nouveau programme de renouvellement urbain … Au cœur de ces dispositifs, sur le terrain, les organismes de logement social et partenaires se mobilisent. Les porteurs projets locaux passent souvent le grand oral devant les instances nationales. On se soumet, on renonce parfois à l’évidence locale pour répondre aux dogmes politiques et suivre leurs grands mouvements de balancier qui érigent en vérité absolue ce qu’ils ensevelissent 6 mois plus tard. Au mépris parfois, souvent, des réalités de nos territoires.

L’évolution des ratios de reconstruction post démolition en est une parfaite illustration. Souvenez-vous : en 2005, c’est 1 logement reconstruit pour 1 logement démoli, quels que soient le territoire et le marché. Puis ce ratio a évolué pour être aujourd’hui très réduit, voire flirter désormais avec zéro sur certains QPV Quartiers prioritaires de la politique de la ville . Lesquels nécessitent cependant encore des démolitions, des restructurations et un peu de reconstruction, certes, mais à dose homéopathique.

Alors certes, il faut savoir se montrer réactif. Mais le rythme du grand balancier politique n’est pas vraiment compatible avec le pas de temps qui est le nôtre. L’aménagement du territoire et la construction de lieux de vie ne sont pas des collections de prêt-à-porter. Une année tout en rose, la suivante en bleue et celle d’après en vert… ça ne peut pas marcher pas comme ça chez nous.

Temporalité XXL

Outre cet effet de balancier, le périmètre de ces politiques est à géométrie variable : certaines parties s’intègrent à une politique à un instant T, pour en être exclues au mouvement suivant…

Dans les faits, on se retrouve avec une 1e tranche de travaux sous perfusion, et la suivante sans la moindre bouffée d’oxygène. Pour autant, sur le terrain, le travail n’est et ne sera jamais terminé, il faut en avoir conscience. Là encore, il faut comprendre et respecter cette fameuse temporalité XXL de l’aménagement du territoire. Il faut des années pour modifier durablement et intelligemment la physionomie de nos territoires, les remettre en phase avec les réalités démographiques, sociales et sociétales contemporaines. C’est une vis sans fin !

Se (re)connecter aux réalités de terrain

De fait, les quartiers prioritaires nécessitent des actions et un engagement au-delà des politiques-outils publics. Ces stratégies publiques impulsées nationalement doivent, demain, donner plus de poids, plus d’écoute, plus de capacité de décision aux gouvernances locales.

Faire confiance aux acteurs de terrain, leur donner des outils et des moyens, conforter leurs stratégies, les laisser animer et structurer leurs actions avec équité et intelligence pratique : dans nos métiers aussi, la décentralisation a tout son sens pour accompagner la restructuration de nos territoires, de nos villes et de nos quartiers, au respect des besoins, ambitions et moyens de chacun.

Question de sécurité

Pour arriver à ce résultat, une fois encore, il sera primordial que l’Autorité Publique reprenne toute sa place, notamment en matière de sécurité. Toutes nos actions d’aménagement du territoire ne pourront tirer durablement les quartiers vers le haut, que si et seulement si, la sécurité et la tranquillité y sont de retour.

L’insécurité est une réalité du quotidien qui entrave notre mission et notre engagement de loger nos clients et leurs familles dans de bonnes conditions. Cette insécurité ne peut pas être uniquement et collectivement reconnue que lorsque les quartiers font l’objet d’une ouverture du journal de 20 h. Et ce d’autant plus que cette insécurité est très souvent le fait d’une poignée de délinquants qui prennent en otage, car il s’agit parfois malheureusement de scènes de guerre, toute la population d’un quartier qui aspire à la tranquillité. 

Sursaut salvateur

Mais au quotidien, dans chacun des organismes de logement social, que l’on œuvre sur des secteurs ultra tendus ou pas, et quels que soient la taille et le périmètre de notre patrimoine, nous avons foi en nos missions de bien-loger. Nous devons croire en ce sursaut de bon sens, entre décentralisation d’une partie du pouvoir décisionnel et maitrise de l’insécurité, au bénéfice des acteurs et projets d’aménagements de nos territoires. A fortiori, en cette veille d’échéances électorales locales, et très bientôt nationales.

La rubrique est animée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. L'édition 2021 est programmée le 27/08/2021 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques). Il est également président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Jacques Ferrand


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Parcours

SACHA (SAC avec Habitat 25)
Directeur général
Fédération des ESH
Trésorier
Neolia
Directeur général
SA Logissim Habitat
Directeur général

Fiche n° 37532, créée le 18/12/2019 à 15:47 - MàJ le 15/12/2023 à 11:57

Neolia

Entreprise sociale pour l’habitat du groupe Action Logement, membre de la société de coordination Habitat 25 et Néolia.
Parc : 27 500 logements
Effectif : 497 salariés
Chiffre d’affaires : 74 M€ (2019)
Président : Serge Goubet
Directeur général  : Jacques Ferrand
Contact : Sophie Di Leo

Catégorie : Bailleurs sociaux


Adresse du siège

34 rue de la Combe aux Biches
25200 Montbéliard France


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Fiche n° 11556, créée le 25/01/2021 à 11:55 - MàJ le 08/12/2023 à 12:23

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