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Loger les travailleurs clés : la difficile concurrence entre ménages prioritaires (F. Guéguen, OPH)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°221106 - Publié le 18/06/2021 à 12:10
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Florent Guéguen, président de l’OPH Montreuillois - ©  D.R.

La crise sanitaire a démontré, de manière cruelle, combien les mauvaises conditions de logement exposent les ménages les plus modestes, vivant dans des logements surpeuplés ou inadaptés au risque épidémique. Elle a souligné la surexposition des travailleurs-euses dit « de première ligne », non protégés par le télétravail qui ont assuré le fonctionnement des services quotidiens à la population, indispensables au fonctionnement du pays. La Seine-Saint-Denis, touchée par une surmortalité de 130 % à l’issue du 1e confinement du printemps 2020 (contre 74 % à Paris et 122 % dans les Hauts-de-Seine, source INED Institut national d’études démographiques ), illustre tristement combien le virus a durement frappé les populations les plus modestes et les travailleurs précaires, écrit Florent Guéguen Président @ Est Ensemble Habitat • Directeur de cabinet du maire @ Mairie du 20e arrondissement de Paris
, président de l’OPH Office public de l’habitat - Créé en 2007, est un organisme public qui construit et gère les habitations à loyer modéré (HLM). Succède à l’office public d’HLM (OPHLM) et à l’office public… Montreuillois (Seine-Saint-Denis) et de la SAC Société anonyme de coordination « Habiter Est ensemble » (créée en février 2021 et composée des offices de Montreuil, Bagnolet, Bobigny et Bondy), dans une tribune adressée à News Tank le 17/06/2021.

Fort de ce constat, la création dans le projet de loi 3DS Loi du 21/02/2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (ex-4D) d’une nouvelle catégorie de personnes prioritaires dans l’attribution des logements sociaux, pour lesquels la convention intercommunale d’attribution fixera « un objectif d’attribution aux demandeurs exerçant une activité qui ne peut être réalisée en télétravail, dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation » est un objectif incontestable en soi.

Voici la tribune de Florent Guéguen.


Surexposition des travailleurs-euses dit « de première ligne », non protégés par le télétravail

La crise sanitaire a démontré, de manière cruelle, combien les mauvaises conditions de logement exposent les ménages les plus modestes, vivant dans des logements surpeuplés ou inadaptés au risque épidémique. Elle a souligné la surexposition des travailleurs-euses dit « de première ligne », non protégés par le télétravail qui ont assuré le fonctionnement des services quotidiens à la population, indispensables au fonctionnement du pays. La Seine-Saint-Denis, touchée par une surmortalité de 130 % à l’issue du 1e confinement du printemps 2020 (contre 74 % à Paris et 122 % dans les Hauts-de-Seine, source INED Institut national d’études démographiques ) , illustre tristement combien le virus a durement frappé les populations les plus modestes et les travailleurs précaires.

Fort de ce constat, la création dans le projet de loi 3DS (ex-4D) d’une nouvelle catégorie de personnes prioritaires dans l’attribution des logements sociaux, pour lesquels la convention intercommunale d’attribution fixera « un objectif d’attribution aux demandeurs exerçant une activité qui ne peut être réalisée en télétravail, dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation » est un objectif incontestable en soi.

Comment ne pas reconnaitre les difficultés à se loger en zone tendue pour ces centaines de milliers de travailleurs-euses, dans les domaine de l’aide à la personne, du soin, du transport, du nettoyage, des services publics de proximité ? Comment ne pas soutenir la nécessaire réduction des déplacements domicile-travail compte tenu de leurs conséquences sur la santé des travailleurs-euses et de son impact environnemental ?

Levier de mixité sociale et de rééquilibrage face à la paupérisation

Pourtant, la création d’une nouvelle catégorie de ménages prioritaires pour l’accès au logement social s’annonce particulièrement périlleuse en Ile-de-France, territoire qui cumule déjà 746 000 demandeurs de logement  (pour 60 000 attributions par an) et qui peine à reloger les ménages reconnus prioritaires au titre du DALO Droit au logement opposable - Institué en 2007, Droit reposant sur une procédure d’attribution sur les quotas préfectoraux de logements sociaux pour les personnes reconnues comme étant mal logées (71 000 ménages prioritaires étaient en attente d’un relogement en 2019 selon les derniers chiffres publiés par le Haut Comité pour le logement des plus défavorisés).

À ces ménages prioritaires pour lesquels l’État à une obligation de résultat, s’ajoute l’obligation issue de la loi Égalité et Citoyenneté (2017) faite aux gestionnaires de contingent (EPCI Établissement public de coopération intercommunale - structure administrative française regroupant plusieurs communes afin d’exercer certaines compétences en commun , bailleurs, État, Action logement, communes…) de mobiliser 25 % des attributions réalisées hors des quartiers en politique de la ville  pour les ménages appartenant au 1er quartile de revenu ainsi que des ménages relogés dans le cadre d’une opération de renouvellement urbain. La aussi, ce principe qui vise à prioriser l’accès au logement des ménages à bas revenus en dehors des quartiers en difficulté peine à s’appliquer (Paris atteint à peine 50 % de l’objectif) du fait de la structure du parc et, surtout, du manque de logements sociaux accessibles hors QPV Quartiers prioritaires de la politique de la ville .

Un territoire qui compte déjà 80 00 demandeurs de logement »

Si le relogement des travailleurs clés peut être un levier de mixité sociale et de rééquilibrage face à la paupérisation d’une partie des occupants du parc HLM, la création de cette nouvelle catégorie de prioritaires aux contours flous (1,16 million de ménages franciliens potentiellement concernés selon la fédération des OPH) alimentera inévitablement la concurrence entre les publics éligibles au logement social, provoquant un véritable dilemme pour les gestionnaires d’attribution.

De ce point de vue, Montreuil (Seine-Saint-Denis), une ville de plus de 100 000 habitants, dotée de 37 % de logements sociaux, est un exemple intéressant : comment intégrer ces nouveaux ménages prioritaires sur un territoire qui compte déjà 80 00 demandeurs de logement (parmi lesquels figurent des travailleurs clés sans qu’il soit aisé de les identifier dans le SNE Système national d’enregistrement - Système informatisé regroupant l’ensemble des données relatives aux demandes de logement social ) dont 80 % disposent de ressources sous les plafonds du PLAI Prêt locatif aidé d’intégration - permet la construction de logements locatifs sociaux pour les personnes se trouvant dans une situation de grande précarité  ?

Effondrement du nombre de logements franciliens agréés en 2020

L’équation s’annonce donc impossible dans un contexte marqué par la chute spectaculaire du taux de rotation dans le parc social (-20 % en 2020) et du nombre de logement à attribuer. La difficulté s’accentue avec l’effondrement du nombre de logements franciliens agréés en 2020 (seulement 20 119 logements sociaux locatifs hors ANRU Agence nationale pour la rénovation urbaine , pour un objectif annuel de 37 000) d’une ampleur historique depuis 14 ans selon l’AORIF Association des organismes HLM de la Région Île-de-France , qui précise « qu’en 2021 nous ne percevons toujours pas de perspective de reprise » du fait du prix élevé des terrains et de la hausse du coût des matières premières.

Ainsi seule une relance significative de la production de logements abordables en zone tendue peut permettre d’absorber, à long terme, une nouvelle catégorie de demandeurs prioritaires. Cela passe par la mise en place de toute une batterie de mesures (relance de l’aide à la pierre, mise à disposition de terrains publics, fiscalité de la construction, compensation des pertes liées à la RLS Réduction de loyer de solidarité …) pourtant cruellement absentes du plan de relance.

Plus que jamais, nous avons besoin d’un choc de production de logements accessibles aux ménages précaires et aux classes populaires dans les métropoles, mixant le locatifs, l’accession sociale à la propriété et le développement de l’offre des Offices Fonciers Solidaires (OFS). Cet effort national est une condition absolue au relogement dans le parc social des centaines de milliers de travailleurs-euses essentiel-les qui ont permis, par leur engagement quotidien, à l’économie nationale de surmonter le choc de la crise sanitaire.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. L’édition 2021 est programmée le 27/08/2021 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur la thématique : « Présidentielle 2022 : plaçons l’habitat au cœur du projet politique ». Jean-Luc Berho est également président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Florent Guéguen


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Parcours

Mairie du 20e arrondissement de Paris
Directeur de cabinet du maire
OPH Montreuillois
Président
Ville de Paris
Conseiller du maire de Paris en charge de la lutte contre l’exclusion et de la protection de l’enfance

Établissement & diplôme

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
DEA de Sciences Politiques

Fiche n° 33173, créée le 31/10/2018 à 11:36 - MàJ le 18/01/2023 à 14:24


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Florent Guéguen, président de l’OPH Montreuillois - ©  D.R.