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Beaucoup de logements ont atteint des minima guère imaginables il y a peu (F. Leclercq, architecte)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°240025 - Publié le 21/01/2022 à 12:00
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François Leclercq - ©  D.R.

En quelques décennies, la qualité des logements s’est fortement améliorée selon des critères techniques. D’abord pour des raisons énergétiques puis environnementales plus encore aujourd’hui au regard de l’urgence climatique. Dans le même temps s’est opérée une réduction de certaines qualités fondamentales des logements, principalement les surfaces, volumes et systèmes de distribution des immeubles. Si la plupart des logements ont continué de porter des qualités de confort essentielles, beaucoup ont atteint des minima guère imaginables il y a peu, faisant disparaître fréquemment la cuisine comme pièce, parfois l’entrée et souvent les rangements, écrit François Leclercq Fondateur de l’agence avec Fabrice Dusapin @ Agence d’architecture François Leclercq
• François Leclercq, diplômé de l'École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette en 1981, fonde…
est architecte et urbaniste, dans une tribune adressée à News Tank, le 20/01/2022.

Les récents épisodes de confinement ont donné une très grande importance au logement et ont révélé d’autant plus ses difficultés (le manque d’espace, de prolongations extérieures, de fonctionnalité domestique quotidienne et d’intimité individuelle). Ainsi, récemment, des citadins ont émis le souhait de changer d’horizon, un rêve de quitter la ville pour aller vivre dans une maison avec jardin.

En 2021, le ministère délégué au Logement lui a confié, avec Laurent Girometti Directeur général @ Établissement public d’aménagement de Marne-la-Vallée (EPA Marne - EPA France)
, la rédaction d’un référentiel sur le logement de qualité en France, remis en octobre 2021 à la ministre Emmanuelle Wargon Présidente @ Commission de régulation de l'énergie (CRE)
. Voici la tribune de François Leclercq.


Déclarer le logement cause d’intérêt général ou grande cause d’intérêt national

En quelques décennies, la qualité des logements s’est fortement améliorée selon des critères techniques. D’abord pour des raisons énergétiques puis environnementales plus encore aujourd’hui au regard de l’urgence climatique. Dans le même temps, s’est opérée une réduction de certaines qualités fondamentales des logements, principalement les surfaces, volumes et systèmes de distribution des immeubles.

Si la plupart des logements ont continué de porter des qualités de confort essentielles, beaucoup ont atteint des minima guère imaginables il y a peu, faisant disparaître fréquemment la cuisine comme pièce, parfois l’entrée et souvent les rangements. De la même manière, les appartements traversants sont devenus rares pour réduire les circulations verticales en allant au bout des logiques de distribution en couloir autorisées par les normes de sécurité incendie et desservant donc majoritairement des logements mono-orientés, climatiquement fragiles.

La concurrence des territoires n’est plus forcément à l’avantage des métropoles »

Les récents épisodes de confinement ont donné une très grande importance au logement et ont révélé d’autant plus ses difficultés (le manque d’espace, de prolongations extérieures, de fonctionnalité domestique quotidienne et d’intimité individuelle).

Ainsi, récemment, des citadins ont émis le souhait de changer d’horizon, un rêve de quitter la ville pour aller vivre dans une maison avec jardin. Cette tendance n’est pas à considérer comme l’humeur d’un moment particulier et existait déjà précédemment, la concurrence des territoires n’est plus forcément à l’avantage des métropoles sur le plan résidentiel. Les territoires supposés oubliés, réveillés par les crises sociales récentes peuvent attirer à nouveau les citadins libres d’organiser leur travail selon les nouvelles donnes mises à jour pendant la pandémie.

Le rêve pavillonnaire peut revenir en force »

Mais surtout le rêve pavillonnaire peut revenir en force comme cela se passe dans la plupart des pays occidentaux actuellement et refabriquer cet éparpillement dans les métropoles du lointain, aux confins de l’ile de France ou d’ailleurs. Ce retour possible à l’étalement urbain, même s’il est contrôlé par des mesures coercitives, n’est plus acceptable aujourd’hui. Bien sûr, le logement n’est pas le seul responsable de ces départs possibles, les prix, la nature, la pollution, les îlots de chaleur, la promiscuité, sont des sujets de difficulté, qui mobilisent, avec raison, les villes aujourd’hui.

Le logement est pourtant la brique essentielle de l’édifice urbain. Elle ne peut donc être fragile.

Observatoire ou réseau de la qualité du logement

La mobilisation autour de la qualité du logement, en particulier dans le cadre d’actions locales, doit pouvoir s’appuyer sur une objectivation et des outils. À ce titre, la mise en place d’un réseau de la qualité d’usage du logement apparaîtrait particulièrement pertinente. Il aurait pour objet de :

  • assembler des éléments de connaissance et de comparaison y compris avec l’étranger, en s’appuyant sur les outils de connaissance existants et en proposant le cas échéant des compléments ;
  • établir un diagnostic précis des différents besoins propres à chaque territoire au travers notamment d’une analyse fine des évolutions sociologique et des modes d’habiter (taille des ménages, décohabitation, co-living, travailleur pendulaire, télétravail…) ;
  • identifier les initiatives locales, les documenter et partager : recueillir et partager les « chartes locales » existantes, les retours d’expérience sur leur mise en œuvre et les effets des initiatives, identifier les bonnes pratiques mais aussi celles qui font difficulté ;
  • pouvoir apporter un appui, un conseil, de la mise en relation, aux acteurs locaux intéressés souhaitant initier ou améliorer leur démarche locale.

Une telle initiative devrait rassembler une large gamme d’acteurs : associations de collectivités, d’opérateurs aménageurs, professionnels de l’immobilier, pouvoirs publics. Nous recommandons d’approfondir rapidement cette piste en étudiant les conditions de mise en place d’une telle initiative : identification de son portage potentiel, évaluation de son coût et des possibilités de financement.

François Leclercq est architecte et urbaniste. Promeneur « inlassable », intuitif, il est convaincu qu’il faut proposer une approche singulière et non-standardisée de la ville. Membre du comité scientifique de l’Atelier International du Grand Paris, il a contribué à l’élaboration du rapport de la mission de réflexion sur le Grand Paris. En 2021, le ministère délégué au Logement lui a confié, avec Laurent Girometti, la rédaction d’un Référentiel sur le logement de qualité en France. Son agence mène des projets urbains de grande échelle et travaille sur l’extension d’Euroméditerranée à Marseille, Reims Grand Centre, la stratégie métropolitaine pour la métropole de Montpellier, l’extension du port de la Grande-Motte, la transformation du Grand Arénas de Nice ou encore la coordination de la ZAC Bercy Charenton à Paris, Mediapark à Bruxelles et La Termica à Malaga.

François Leclercq a enseigné à Tolbiac puis à l’École d’architecture de Marne-la-vallée. Il a publié plusieurs tribunes et ouvrages dont Ville affectives, villes effectives (2004), Pour la ville, quel que soit l’état du monde (2006), Géographies sentimentales (2012) et Retour au Bois habité (2014).

Développer des outils pour armer les collectivités

Les chiffres actuels de la construction témoignent d’un certain ralentissement de la production du logement, renforcé récemment par un malthusianisme municipal réticent à une densification rarement souhaitée par les habitants déjà en place.

Dans ce contexte, les maires de plus en plus rétifs à la construction doivent devenir des acteurs à part entière de l’élaboration des programmes immobiliers dès le démarrage des opérations.

  • Les chartes de qualité proposées par certaines municipalités ou intercommunalités démontrent cette possibilité par des cahiers de prescriptions garants d’une négociation productive avec les promoteurs. Le retour d’expérience démontre que contrairement à ce qui avait été pressenti, de tels outils ne constituent pas toujours un frein au secteur de la construction. Les exigences claires imposées à tous dans un cadre défini permettent au contraire, dans bien des cas, d’accélérer l’ensemble des procédures et de fluidifier les opérations : tout est question de bonne utilisation des outils, une charte peut être un bon moyen d’accompagner une politique volontariste de production des logements.

Le PLU Plan local d’urbanisme est un des outils privilégié de l’arsenal réglementaire des maries. Cependant en dehors du fait qu’il est souvent perçu comme trop lourd, avec une instruction complexe qui ne permet que peu de fluidité au détriment de l’offre, il ne permet pas non plus de de contrôler la répartition typologique d’une opération et encore moins la qualité intrinsèque des logements qui y sont construits. Le renforcement du pouvoir des collectivités territoriales passerait donc notamment par le fait d’intégrer au PLU la possibilité de s’intéresser à l’intérieur des opérations et plus encore à l’intérieur des logements (surfaces, hauteur sous plafonds, orientations…).

Appréhender un nombre d’étages plutôt qu’une hauteur maximale constructible »

L’assouplissement ou l’élargissement de son champ d’action permettrait aux collectivités territoriales de disposer d’un véritable pouvoir sur la qualité des logements construits sur leur territoire. Un élément important et assez facile à mettre œuvre concernerait notamment le fait de permettre au PLU d’appréhender un nombre d’étages plutôt qu’une hauteur maximale constructible. Cela aurait une incidence direct sur les hauteurs sous-plafond, les volumes et partant l’habitabilité des logements.

La période récente témoigne d’une désaffection de plus en plus importante pour les immeubles de bureaux, illustré par un réorientation croissantes des capitaux des investisseurs institutionnels du tertiaire vers le logement. Pour accompagner cette évolution, il serait intéressant de développer des permis de construire anticipant ces transformations et destinations futures, favorisant et facilitant la réversibilité bureau.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. L'édition 2021 a eu lieu le 27/08/2021 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur la thématique : « Présidentielle 2022 : plaçons l’habitat au cœur du projet politique ». Jean-Luc Berho est également président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

François Leclercq


• François Leclercq, diplômé de l'École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette en 1981, fonde son agence d’architecture avec Fabrice Dusapin en 1980.

L’architecte a également conçu et développé les projets urbains du Bois Habité dans le quartier Euralille (Lille), de Paris Nord Est (Paris), de l’extension d’Euroméditerranée (Marseille) ou le plan stratégique du quartier d’affaires de La Défense.

• 1996 : il remporte le Prix de l'Équerre d’argent pour le siège de la Caisse nationale de prévoyance à Angers

• En 2010 : il installe François Leclercq architectes urbanistes dans de nouveaux locaux dans le 20e arrondissement à côté du Père Lachaise.

• 2017 : l’agence prend une nouvelle dimension avec cinq nouveaux associés : elle devient Leclercq & associés.

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Parcours

Agence d’architecture François Leclercq
Fondateur de l’agence avec Fabrice Dusapin

Établissement & diplôme

L'École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette
Diplômé DPLG

Fiche n° 30861, créée le 28/05/2018 à 14:26 - MàJ le 28/05/2018 à 14:46

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François Leclercq - ©  D.R.