Demandez votre abonnement gratuit d'un mois !

Changer de paradigme pour résoudre la crise du logement : l’exemple néo-aquitain (B. Etcheçaharreta)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°269592 - Publié le 04/11/2022 à 09:00
- +
©  D.R.
Bixente Etcheçaharreta - ©  D.R.

La crise du logement est particulièrement vive au Pays Basque, à Bordeaux et sur le littoral néo-aquitain. Elle ne se résoudra pas uniquement pas des constructions supplémentaires. Elle doit nous interroger sur notre modèle de développement. Plutôt que de concentrer toutes les activités dans les métropoles ou le littoral, changeons de paradigme ! Investissons dans nos territoires et menons une véritable politique d’aménagement qui construira des écosystèmes humainement et écologiquement plus Prêt locatif à usage social - catégorie correspondant aux HLM traditionnels (65 % de la population française éligible), loyers plus élevés que pour ceux des logements PLAI soutenables, écrit Bixente Etcheçaharreta Conseiller régional délégué à la Communication et porte-parole @ Région Nouvelle-Aquitaine (Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine)
, porte-parole et conseiller régional Nouvelle Aquitaine, dans une tribune adressée à News Tank, le 02/11/2022.

La stratégie du choc d’offre n’a pas fonctionné. La flambée des prix s’exerce partout sur les loyers, l’immobilier, le foncier et les matériaux de construction et plus encore, là où la demande de logement est la plus forte. L’insuffisance de logements et l’inadéquation de l’offre à la demande caractérisent la situation nationale qualifiée de « crise » depuis des décennies, sans que la production ne soit jamais à la hauteur du besoin, en volume et en qualité.

Voici la tribune de Bixente Etcheçaharreta.


La stratégie du choc d’offre n’a pas fonctionné

Les Entretiens d’Inxauseta se sont tenus fin août 2022 au Pays Basque sur le thème « Un nouveau quinquennat s’ouvre : ne perdons pas de temps ! ». En effet, les questions d’habitat ont été trop peu prises en compte pendant la campagne présidentielle, comme cela a été souligné par les médias et les acteurs du logement. Pourtant, le pouvoir d’achat s’est imposé comme la première préoccupation des français. Le logement demeure plus que jamais le premier poste de dépenses pour une part croissante des ménages et plus que jamais un déterminant fondamental de leur qualité de vie.

La stratégie du choc d’offre n’a pas fonctionné. La flambée des prix s’exerce partout sur les loyers, l’immobilier, le foncier et les matériaux de construction et plus encore, là où la demande de logement est la plus forte. L’insuffisance de logements et l’inadéquation de l’offre à la demande caractérisent la situation nationale qualifiée de « crise » depuis des décennies, sans que la production ne soit jamais à la hauteur du besoin, en volume et en qualité.

Les révolutions engendrées par Airbnb puis la banalisation du télétravail - dont on ne mesure pas encore pleinement les conséquences - ont accru ce déséquilibre en intensifiant la demande sur des territoires prisés. Dans les secteurs tendus, comme la métropole bordelaise, les agglomérations de la Rochelle et du Pays Basque, la pression foncière et immobilière évince les classes moyennes et populaires. Malgré la livraison de nombreux nouveaux logements, le stock de locations à l’année s’amoindrit au profit de locations au jour ou à la semaine bien plus rémunératrices sur les plateformes. Plus on construit, plus la rareté se renforce, un véritable tonneau des Danaïdes.

700 logements étudiants par an, 5 000 logements d’ici à 2027

L’hyper attractivité détruit la mixité de ces territoires mais elle affaiblit plus largement le dynamisme social dans le pays. L’exemple de la formation des jeunes est éclairant. La concentration des lieux de formation dans un nombre réduit de métropoles comme Paris, et les capitales régionales, conduit à créer des barrières financières à la poursuite d’études. C’est notamment le cas des jeunes ruraux pour qui trouver un logement étudiant dans une métropole et faire face à des loyers grandissants dissuade la poursuite d’études. 

Opérations de logement étudiant à faibles loyers »

Bien que le logement ne soit pas de ses premières attributions, la Région ne peut être indifférente à cette situation qui sape ses équilibres. La Nouvelle Aquitaine a investi 21 M€ pour financer le logement des jeunes lors du dernier mandat et s’engage singulièrement dans le nouveau Contrat de Plan État-Région. En outre, nous travaillons avec les territoires pour réunir les conditions d’équilibre économique permettant de réaliser des opérations de logement étudiant à faibles loyers (PLUS Prêt locatif à usage social - catégorie correspondant aux HLM traditionnels (65 % de la population française éligible), loyers plus élevés que pour ceux des logements PLAI voire PLAI Prêt locatif aidé d’intégration - permet la construction de logements locatifs sociaux pour les personnes se trouvant dans une situation de grande précarité ) et serons à l’écoute des propositions nouvelles sur le sujet.  

À partir des compétences qui sont les nôtres, nous travaillons à accélérer le développement de logements pour les jeunes travailleurs et les étudiants avec l’objectif d’atteindre un ratio de 12 logements sociaux pour 100 étudiants (8,5 actuellement). Pour les 7 prochaines années, la Région propose de mobiliser 25,8 M€, essentiellement pour la construction de logements étudiants. Cela permettra de financer environ 700 logements étudiants par an, soit 5 000 logements d’ici à 2027.

Une crise qui ne cesse de s’aggraver

En dehors des zones tendues, le pays est vaste »

D’ici à 2030, 23 000 nouveaux ménages seront à loger chaque année en Nouvelle Aquitaine. L’offre foncière, difficilement extensible à court terme, et de plus en plus rare explique la réaction excessive des prix sur les marchés les plus tendus, là où précisément la concurrence s’avère la plus forte, entre les différents usages que sont les logements, les bureaux, les équipements publics et privés, les entrepôts… Lorsque plusieurs types d’usages sont possibles sur un même terrain, en économie de marché, c’est l’opération qui peut supporter la plus forte charge foncière qui sera réalisée. Et la concurrence des usages pénalise le plus souvent le seul logement social.

Beaucoup a déjà été dit sur les difficulté des acteurs à augmenter significativement la production de logements dans les zones tendues. En tant qu’élu régional, élu du Pays Basque intérieur, je suis toutefois frappé par l’absence de réflexion d’ensemble sur cette problématique. En prenant du recul et en dézoomant, une chose frappe : en dehors des zones tendues, le pays est vaste !

À l’échelle nationale, on recenserait, d’après le conseil national de l’ordre des architectes, 2 à 3 millions de logements vacants, dont 600 000 à 700 000 logements vacants dans les villes moyennes. La reconquête des immeubles vacants est un des leviers essentiels pour répondre au double défi qu’imposent la réduction de la consommation foncière et les besoins en production de logements abordables. Mais dans les petites centralités, maille indispensable à la cohésion de notre grande région,  la requalification des centres-bourgs peine à trouver un modèle économique viable, d’autant que près de 200 petites centralités en Nouvelle Aquitaine n’ont pas accès aux aides ouvertes par les dispositifs d’État (Petites Villes de demain, Action Cœur de ville).

Malade de cette logique centralisatrice

Chacun peut le saisir : plutôt que de mener une véritable politique d’aménagement du territoire, les pouvoirs publics n’ont fait qu’entériner et accompagner les dynamiques de concentration vers la capitale et quelques métropoles. La France est malade de cette logique centralisatrice, prisonnière de la macrocéphalie parisienne qui irrigue son histoire et nos imaginaires. Cette logique d’hyper-concentration de toutes les activités, est un anachronisme qui conduit à des déséquilibres humains et écologiques béants. 

Logique d’hyperconcentration de toutes les activités »

Ne devrions pas nous étonner du maintien dans le seul Paris intra-muros de tous les ministères et administrations centrales ? Ne devrions-nous pas légitimement nous étonner de la présence à Paris du ministère de la Mer ou de l’Agriculture ? Ne devrions-nous pas nous étonner de la concentration des lieux de formation dans les métropoles alors que l’enseignement supérieur est un levier de dynamisation et de respiration sociale dans les territoires ? Pourquoi s’étonner de la pénurie de logements lorsqu’on ne cesse d’agréger les activités dans des espaces si étroits ?

Sur ce domaine aussi la Nouvelle-Aquitaine agit, avec les moyens qui sont les siens, c’est-à-dire incomparablement plus modestes que les Landers allemands ou les régions autonomes d’Espagne. Elle investit dans le tissus économique des territoires en encourageant leurs PME, en impulsant une logique de réindustrialisation et de circuits courts. Avec un certain succès puisque la Région a créé 36 % de l’emploi industriel en France avant la pandémie.

Construire la résilience de la société

La Région rénove les lignes ferroviaires laissées exsangue par des décennies de sous-investissement de l’État et de la SNCF et rouvre des gares de proximité comme dernièrement à Itxassou, sur la ligne Bayonne-Saint-Jean-Pied-de-Port. Elle déconcentre des lieux de formation comme par exemple les premières années de médecine, à Pau et Dax, faisant croître très significativement la part des boursiers dans ces promotions, pour des résultats comparables à ceux observés à Bordeaux.

Le renouveau viendra des territoires »

En relocalisant ces activités nous dynamisons des bassins de vie et d’emplois qui offrent des conditions d’existence épanouissantes et bien plus abordables que celles observées dans les zones tendues. Nous construisons la résilience de notre société en déconcentrant l’activité et en équilibrant ses besoins en ressources naturelles. Notre chance est de vivre une époque inédite par l’ampleur de ses défis. Nous vivons la fin d’un monde, les logiques anciennes survivent encore mais s’épuisent. Notre conviction est que le renouveau viendra des territoires. « Tout renouveau est avant tout un retour aux sources » disait Romain Gary. À nous de rompre avec les paradigmes qui sont autant de fuites en avant, pour ré-ancrer le pays sur ses territoires.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La dernière édition a eu lieu le 26/08/2022 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur le thème de l’urgence à agir. Jean-Luc Berho est également président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Bixente Etcheçaharreta


Consulter la fiche dans l‘annuaire

Parcours

Région Nouvelle-Aquitaine (Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine)
Conseiller régional délégué à la Communication et porte-parole
Banque des territoires
uditeur - Pôle Banque des Territoires
Groupe Crédit du Nord
Chef de mission - Inspection générale

Fiche n° 47721, créée le 03/11/2022 à 19:29 - MàJ le 04/11/2022 à 08:21

Région Nouvelle-Aquitaine (Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine)

• Rassemble les départements de la Charente, Charente-Maritime, Corrèze, Creuse, Dordogne, Gironde, Landes, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques, Deux-Sèvres, Vienne, Haute-Vienne
• Compétences exclusives : développement économique, gestion des programmes européens, formation professionnelle, apprentissage et alternance, lycées, aménagement du territoire et environnement, transports.
• Budget régional (2022) : 3,3 Md €
• Préfecture : Bordeaux
• Président : Alain Rousset
• Composition du conseil régional : 183 membres
• Contact : Pierre Lasterra, service de presse - cabinet du président, 05 57 57 02 95

Catégorie : Collectivités


Adresse du siège

14, rue François de Sourdis
33077 Bordeaux Cedex France


Consulter la fiche dans l‘annuaire

Fiche n° 9095, créée le 11/09/2019 à 11:07 - MàJ le 29/03/2023 à 17:01

©  D.R.
Bixente Etcheçaharreta - ©  D.R.