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Nécessité d’un véritable choc de l’offre locative en France (Karine Julien-Elkaïm, Logirep)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°316809 - Publié le 01/03/2024 à 10:45
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Karine Julien-Elkaïm, présidente du directoire de LogiRep - ©  V2 D.R.

Le secteur du logement va mal. L’offre locative se raréfie faute d’un effort de construction suffisant dans les territoires tendus. Moins de permis de construire délivrés, c’est tout simplement moins de logement locatif produit ! À cela s’ajoute une pression trop forte des locations meublées touristiques sur le marché de la location longue durée et une interdiction progressive de location des passoires thermiques. Si elle est vertueuse par principe, cette interdiction s’inscrit dans un calendrier trop court pour vraiment bénéficier aux locataires, écrit Karine Julien-Elkaïm Vice-présidente @ Fédération des entreprises sociales de l’habitat (FESH) • Présidente du directoire @ Logirep • Présidente du comité exécutif @ Polylogis
, présidente du directoire de LogiRep • Maison mère du groupe Polylogis • Création : 1960 • Présidente du directoire : Karine Julien-Elkaïm • Tél. : 01 40 99 45 00 et du comité exécutif du groupe Polylogis • Bailleur social indépendant• Activité : opérateur global de l’habitat (construction, rénovation, aménagement, gestion locative, transactions immobilières, administration de biens, gestion de… , dans une tribune adressée à News Tank le 29/02/2024.

Les solutions que l’on nous propose ne sont pas à la hauteur des défis ! La décentralisation de la politique du logement est en place sur l’essentiel des compétences depuis de nombreuses années. Elle n’a pas permis d’avoir une politique de l’habitat ambitieuse. Il a fallu attendre la loi SRU Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, du 13/12/2000, dont l’article 55 impose un quota de 25 % de logements sociaux en 2025, dans chaque commune de 3 500 habitants et une régulation par la puissance publique pour dynamiser la production de logements sociaux. Le choc de l’offre reste un concept qui ne s’est jamais concrétisé.

Ces constats nous amènent à la nécessité de faire de l’offre locative abordable la priorité n° 1 des pouvoirs publics, État et collectivités locales.

Voici la tribune de Karine Julien-Elkaïm.


Les premières victimes : les jeunes

Le secteur du logement va mal. L’offre locative se raréfie faute d’un effort de construction suffisant dans les territoires tendus. Moins de permis de construire délivrés, c’est tout simplement moins de logement locatif produit ! À cela s’ajoute une pression trop forte des locations meublées touristiques sur le marché de la location longue durée et une interdiction progressive de location des passoires thermiques. Si elle est vertueuse par principe, cette interdiction s’inscrit dans un calendrier trop court pour vraiment bénéficier aux locataires.

L’offre locative abordable est aussi de moins en moins disponible dans le parc social. Les locataires en place préfèrent rester dans un logement inadapté à leurs besoins ou à leurs ressources à défaut de pouvoir accéder à la propriété. Les premières victimes : les jeunes qui se retrouvent de plus en plus exposés à la cherté du logement, avec comme seule solution, le parc privé aux loyers élevés et une perspective d’accès à la propriété largement retardée par rapport aux générations ainées.

Le système est grippé et les causes sont multiples

Les conditions d’accès au parc social sont devenues extrêmement complexes, la lourdeur administrative de plus en plus forte : une simplification des procédures et la mise en commun des données dont disposent les administrations s’imposent !

Les objectifs d’attribution s’ajoutent les uns aux autres et finissent par rendre toute politique de mixité sociale inopérante. La loi Égalité & citoyenneté qui visait à s’attaquer à la concentration de la pauvreté dans certains quartiers est bien trop compliquée pour être efficace. La paupérisation du parc social reste concentrée dans certaines communes et dans certains quartiers. Revenons à des choses simples !

Dispositifs ou trop exigeants ou trop méconnus »

Quant à la politique fiscale, elle ne fonctionne pas ! La défiscalisation Pinel, en extinction, ne permettait pas aux élus de piloter la production d’une offre abordable sur leur territoire. Le prêt à taux zéro a été recentré et risque d’être rapidement dans le viseur de Bercy et de la Cour des comptes • Juridiction indépendante, à équidistance du Parlement et du Gouvernement. • Missions : veille à la régularité, à l’efficience et à l’efficacité de l’usage des fonds publics (missions précisées… , avec un coût qui s’accroit dans un contexte de taux élevés. La niche fiscale sur les locations meublées touristiques a eu des effets délétères sur le marché de la location longue durée. Les outils de défiscalisation intervenant dans l’immobilier existant comme le Denormandie dans l’ancien ou Loc’Avantages, trop exigeants ou trop méconnus ne décollent pas alors qu’ils pourraient favoriser la création d’une offre locative abordable et de qualité. Certes, le régime du logement locatif intermédiaire a démontré son efficacité et son efficience sur les dépenses publiques consacrées à la constitution d’un parc locatif abordable complémentaire au parc social. Il a été assoupli pour être plus attractif. Mais il reste victime de la crise de l’offre. La lourdeur de la réglementation sur les rapports entre propriétaires et locataires ne facilite pas la reconquête des investisseurs institutionnels qui regardent l’immobilier résidentiel en France avec beaucoup de méfiance.

Le choc de l’offre, concept jamais concrétisé

Les solutions que l’on nous propose ne sont pas à la hauteur des défis ! La décentralisation de la politique du logement est en place sur l’essentiel des compétences depuis de nombreuses années. Elle n’a pas permis d’avoir une politique de l’habitat ambitieuse. Il a fallu attendre la loi SRU Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, du 13/12/2000, dont l’article 55 impose un quota de 25 % de logements sociaux en 2025, dans chaque commune de 3 500 habitants et une régulation par la puissance publique pour dynamiser la production de logements sociaux.

Tout faire pour que la pression de la demande diminue »

Le choc de l’offre reste un concept qui ne s’est jamais concrétisé. Les OIN Opération d’intérêt national - Permet une gouvernance collégiale renforcée et la mise à disposition des moyens de l’État et de ses opérateurs aux collectivités. n’ont jamais permis de répondre rapidement aux besoins en logements. Quant aux logements vacants, ils se situent majoritairement dans des territoires détendus. Expliquer que c’est la solution à notre problème d’offre n’est pas sérieux sauf à considérer que l’État rejoue un rôle actif dans l’aménagement du territoire national. Dans ce cas, il faut avant tout piloter une politique d’industrialisation et de création d’emplois combinée à la remise sur le marché de logements vacants, souvent obsolètes et déconnectés des attentes des ménages. L’encadrement des loyers dont certaines villes se sont saisies n’a fait qu’entretenir l’idée qu’il suffirait de limiter les abus pour conserver un parc locatif abordable. C’est faux ! Il faut construire et rénover le parc locatif pour que la pression de la demande diminue.

Ce doit être la mère des batailles

Ces constats nous amènent à la nécessité de faire de l’offre locative abordable la priorité n° 1 des pouvoirs publics, État et collectivités locales. Une politique publique doit répondre à l’intérêt général, celui de permettre à chacun de se loger à un coût supportable, donc de payer un loyer adapté à ses revenus. Ce doit être la mère des batailles pour la relance de l’immobilier. L’achat de la résidence principale des Français ne peut pas être la principale boussole de la politique du logement dans le contexte que nous connaissons ! Soyons solidaires des jeunes qui arrivent sur le marché du travail !

Pour faciliter leur accès au parc social, il faut simplifier la loi et la réglementation sur les attributions, faire confiance aux bailleurs sociaux et les libérer des contraintes sur les loyers, notamment dans le cadre des réhabilitations. Laissons-les faire en leur permettant d’adapter les loyers sous le contrôle de l’État et des conférences intercommunales du logement, en constatant les résultats sur le terrain.

Lisser l’effort du propriétaire et de l’État dans la durée »

Quant au parc locatif privé, supprimons les dispositifs fiscaux destinés aux bailleurs privés au profit d’un système d’amortissement comptable des investissements réalisés dans le parc ancien. C’est une manière de favoriser les investissements et de lisser l’effort du propriétaire et de l’État dans la durée. L’amortissement conditionné à un plafonnement des loyers, équivalent au LLI Logement locatif intermédiaire , sera doute plus efficace que l’encadrement des loyers pratiqué aujourd’hui qui ne fait que contenir les augmentations de loyers déjà élevés !

Principe de juste occupation relevant d’un droit et d’un devoir

Pour éviter un ancrage durable des locataires du parc locatif social, mobilisons les deniers publics pour produire une offre d’accession à prix abordable qui soit pérenne. Il faut des produits à prix encadrés à l’achat et à la revente de façon à disposer d’une offre durable et renouvelable. C’est le modèle du BRS Bail réel solidaire - Créé par la loi ALUR : le ménage est propriétaire de sa maison mais locataire du terrain. Contient des clauses de prix de revente et des plafonds de ressources des acheteurs qu’il faut amplifier, adapter et généraliser pour que les aides publiques ne soient pas captées par le premier accédant. Ainsi, nous pourrons accroître les solutions de sortie pour les locataires du parc social tout en favorisant la maîtrise des prix.

Car oui, disons-le : si le développement d’un parc à loyer abordable doit être au cœur des priorités des pouvoirs publics, ce n’est pas pour autant satisfaisant de faire du parc HLM la première et dernière étape d’un parcours résidentiel. Le droit au maintien dans les lieux dans le parc social est contradictoire avec une politique publique du logement basée sur la solidarité. Il faut transformer le droit au maintien dans les lieux en un principe de juste occupation, relevant à la fois d’un droit et d’un devoir : juste occupation par l’adéquation loyers - revenus, juste occupation entre la composition du ménage et le nombre de pièces. C’est ainsi que nous pourrons remettre en marche toute la chaîne du logement et favoriser la rotation des ménages dans le parc locatif.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La prochaine édition est prévue le 30/08/2024 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur le thème du logement. Jean-Luc Berho est président du conseil de surveillance de la Coopérative de l’immobilier à Toulouse, administrateur de l’association Aurore, administrateur d’Espacité et membre du Conseil National de l’Habitat. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Karine Julien-Elkaïm


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Parcours

Logirep
Présidente du directoire
Polylogis
Présidente du comité exécutif
Union sociale pour l’habitat (USH)
Membre du comité exécutif
Logirep
Membre du directoire
Polylogis
Secrétaire générale
Polylogis
Directrice administrative et financière
Solendi
Directrice financière

Établissement & diplôme

ICS Bégué
Diplôme

Fiche n° 32199, créée le 30/07/2018 à 11:06 - MàJ le 29/02/2024 à 16:23

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