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Les composantes environnementales et sociétales absentes de l'équation du logement (Arnaud Ménard)

News Tank Cities - Paris - Tribune n°292224 - Publié le 19/06/2023 à 08:30
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Arnaud Ménard - ©  D.R.

Complexe est l'équation du logement où il est question (d’absence) de vision, de méthode et de valorisation des composantes environnementales et sociétales. Le 09/03/2022, un mois avant l’élection présidentielle, plusieurs acteurs du logement (dont l’USH Union sociale pour l’habitat - organisation représentative du secteur HLM : 720 organismes à travers 5 fédérations , la FFB Fédération française du bâtiment , la Fondation Abbé Pierre, France Urbaine et Intercommunalité de France) se retrouvaient pour formuler des propositions concrètes et faire de l’alliance du logement la grande cause nationale du quinquennat, écrit Arnaud Ménard Partner @ Impulse Partners
, de la société de conseil Impulse Partners, dans une tribune adressée à News Tank le 17/06/2023.

Un an, de difficiles négociations et un CNR Conseil national de la refondation - grande consultation publique dans le cadre du CNR lancé par le chef de l'État le 08/09/2022 plus tard, les déceptions du côté des acteurs du logement s’étalent dans les prises de parole qui déplorent un manque de vision et une sorte de déclassement de la question du logement. Et, paradoxalement, il semble que rarement les acteurs ont autant collaboré pour adresser les sujets de production de logement, de transition énergétique, de cohésion sociale et pour formuler des propositions concrètes d’une même voix. Si on regarde la moitié pleine du verre, on pourrait dire que c’est dans le vide que s’imaginent les solutions et s’organisent les acteurs. Si l’on regarde l’autre moitié, moins réjouissante, on pourrait dire que sans direction claire et sans moyens à la hauteur, tout cela accouchera d’une souris.

Voici la tribune d’Arnaud Ménard qui interviendra lors des Entretiens d’Inxauseta le 25/08/2023 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques).


Complexe est l'équation du logement

Complexe est l'équation du logement où il est question (d’absence) de vision, de méthode et de valorisation des composantes environnementales et sociétales Le 09/03/2022, un mois avant l’élection présidentielle, plusieurs acteurs du logement (dont l’USH Union sociale pour l’habitat - organisation représentative du secteur HLM : 720 organismes à travers 5 fédérations , la FFB Fédération française du bâtiment , la Fondation Abbé Pierre, France Urbaine et Intercommunalité de France) se retrouvaient pour formuler des propositions concrètes et faire de l’alliance du logement la grande cause nationale du quinquennat.

Un an, de difficiles négociations et un CNR Conseil national de la refondation - grande consultation publique dans le cadre du CNR lancé par le chef de l'État le 08/09/2022 plus tard, les déceptions du côté des acteurs du logement s’étalent dans les prises de parole qui déplorent un manque de vision et une sorte de déclassement de la question du logement. Et, paradoxalement, il semble que rarement les acteurs ont autant collaboré pour adresser les sujets de production de logement, de transition énergétique, de cohésion sociale et pour formuler des propositions concrètes d’une même voix. Si on regarde la moitié pleine du verre, on pourrait dire que c’est dans le vide que s’imaginent les solutions et s’organisent les acteurs. Si on regarde l’autre moitié, moins réjouissante, on pourrait dire que sans direction claire et sans moyens à la hauteur, tout cela va accoucher d’une souris.

Et pourtant… Pourtant l’alarmante fragilisation de la cohésion sociale, l’urgence de la transition environnementale et la concomitance de crises structurelles et conjoncturelles imposent des réponses à la hauteur, coordonnées et rapides.

Outils et modèles non conçus pour intégrer une vision globale

Ce constat-là, très largement partagé, ne fait pas spécialement débat, ce qui interroge c’est notre capacité collective et celle de nos modèles et organisations à être au rendez-vous de ces enjeux. Si les financements ne viennent pas c’est peut-être que les modèles d’investissements et plus largement les modèles économiques prédominants n’ont pas su intégrer pleinement les enjeux sociétaux et environnementaux. Tout au mieux en ont-elles fait des composantes de garde-fous ou de différenciation. Mais elles n’ont pas su les placer au cœur des décisions et des investissements.

Le premier réflexe est de prioriser les enjeux »

Alors quand la cohésion sociale reste à peu près stable, sous perfusion de financements publics répétés pour limiter la casse, quand la transition environnementale ne se fait vraiment menaçante qu’à une échelle de temps hors de portée du ressenti, cela semble suffire. Mais quand on commence à planifier sérieusement les nouveaux logements à produire, qu’on y ajoute les nécessaires transitions environnementales qui imposent de rénover massivement, de ne pas artificialiser, de concevoir plus vertueusement et qu’on complète avec une crise économique qui impacte les taux et une crise énergétique qui met en tension le pouvoir d’achat, on réalise que l’équation devient particulièrement complexe. Et le premier réflexe est de prioriser les enjeux, comme s’il fallait choisir entre deux enjeux qui ne se discutent pas. On se rassure dans la difficile mise en mouvement collective avec des formules trompeuses qui se plaisent à opposer fin de mois et fin du monde.

Nous essayons de répondre à une équation complexe avec des outils et des modèles qui ne sont pas conçus pour intégrer une vision globale. C’est en qualité d’observateur attentif mais qui a encore beaucoup à comprendre et à apprendre des questions de logement que nous souhaitons vous livrer plusieurs pistes de réflexions qui suggèrent de concevoir et de promouvoir des approches globales qui permettent de faire évoluer les modèles de manière concertée, profitable et durable.

Deux nouvelles inconnues à intégrer dans l’équation du foncier

Au cœur de débats passionnés, points de rencontre entre les politiques publiques, le territoire, les développeurs, les gestionnaires et les utilisateurs, le foncier est la première équation qu’il est intéressant d’interroger.

La valeur environnementale intrinsèque

À l’heure de la ZAN Zéro artificialisation nette - Objectif de réduction de la consommation d’espace à zéro unité nette de surface consommée en 2050, fixé par le plan Biodiversité du Gouvernement en juillet 2018 dont la mise en œuvre à venir interroge déjà, de la sobriété foncière, de la préservation de la biodiversité d’une part et de la hausse des couts de construction, et de la nécessité de poursuite de l’activité de production d’autre part, il semble que le foncier constitue une première ligne de bilan qui ne peut être totalement décorrélée de ces injonctions.

Indexer la valeur du foncier à sa valeur environnementale »

Comment imaginer que la valeur économique d’un foncier à (re-)développer ou à transformer ne tienne pas réellement compte de sa valeur environnementale intrinsèque. Comment se fait-il que le niveau d’artificialisation, le degré de pollution, la valeur écologique, le niveau de raccordement aux infrastructures et aux réseaux existants ou à développer n’entrent pas réellement en considération dans la valeur du foncier si nous avons la conviction que ce sont des éléments de valeurs attendus. Comment, dès lors, faire de cette valeur environnementale intrinsèque un levier de facilitation ou à l’inverse de contrainte d’accès aux fonciers ? Comment indexer la valeur du foncier à sa valeur environnementale ?

Les valeurs sociétales et environnementales projetées

Peut-on, en outre, clore le chapitre de la valorisation du foncier sans interroger la place du projet et singulièrement de ses valeurs sociétales et environnementales. Faut il considérer que la valeur projetée sur ces deux volets doit ou peut avoir un impact sur l’accessibilité du foncier au-delà des règlements d’urbanisme, des attentes de collectivités ou des impositions réglementaires globales.

Des rustines trompeuses et coûteuses »

La question reste de savoir comment évaluer intelligemment ces valeurs projetées, sur quel référentiel commun et décliné par territoire et actualisable dans le temps ? Comment prédéterminer cette valeur en amont du projet sans contraindre les usages possibles et les possibles évolutions naturelles ? Ce qui est certain c’est que tant que ces valeurs sociétales et environnementales ne seront pas placées au cœur de l’équation et des bilans, toute le reste ne sera que rustines trompeuses, coûteuses et c’est à craindre bien insuffisantes. Tant que nous n’aurons pas fait évoluer nos modèles économiques sur ces questions, les acteurs continuerons à défendre leurs causes pour obtenir les compléments de financements nécessaires dans une équation toujours insoluble.

Le mur de la rénovation énergétique et bas carbone

Un programme coordonné de premiers de séries et de pré-industrialisation des filières et des modèles face au mur de la rénovation énergétique et bas carbone. Sur la question de la rénovation énergétique et bas carbone du parc de logements, tous les spécialistes s’accordent à le dire, nous sommes face à un mur et nous manquons d’élan, d’expérience et de moyens. A titre d’exemple, la très intéressante Étude prospective sur la stratégie bas carbone des OPH Office public de l’habitat - Créé en 2007, est un organisme public qui construit et gère les habitations à loyer modéré (HLM). Succède à l’office public d’HLM (OPHLM) et à l’office public… à horizon 2050 : enjeux carbone, axes d’action et questions structurantes, réalisée par les cabinets Carbone 4 et Erese sous la direction de la FOPH Fédération nationale des Offices Publics de l’Habitat donne ainsi à voir l’écart entre la trajectoire tendancielle de rénovation et une trajectoire supposée compatible avec la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC Stratégie nationale Bas-Carbone -adopté en 2015, en lien avec le Plan Climat. Elle vise la réduction des gaz à effet de serre ).

Pas encore au point sur la méthode ni sur l’organisation »

Alors que tout oblige à agir vite, efficacement, massivement et collectivement, il y a quelque chose de l’ordre de la sidération. On envisage, on étudie, on teste, on expérimente, on annonce des objectifs à des horizons qui donnent le sentiment qu’on réussira à s’organiser. Il y a, il faut le reconnaître, au cours des dernières années une accélération des initiatives, des dispositifs d’aides, des incitations. Il y a de grands plans budgétaires qui, bien que jugés insuffisants, ouvrent la voie. Mais à bien y regarder au-delà d’une volonté politique forte et de moyens à la hauteur qui, espérons-le, finiront bien par arriver, il semblerait que nous ne soyons pas encore tout à fait au point sur la méthode ni sur l’organisation.

Process industriel et phase fondamentale

La question est posée. Si nous avions la possibilité demain de financer massivement des travaux de rénovation énergétique sur les 10 prochaines années, est-on certains de disposer de tous les fondamentaux pour nous y mettre vraiment ?

Est-on prêt à accélérer et à massifier l’action ? Les filières sont-elles prêtes ? Les solutions techniques les matériaux, les équipements, les outils de mise en œuvre, les compétences, les processus industriels seront-ils au rendez-vous ? Tous les territoires sont-ils au même niveau ? Est-on réellement prêts à passer à la phase d’industrialisation massive de la rénovation énergétique et bas carbone ?

Il semblerait bien que le passage des initiatives qu’on pourrait qualifier de balbutiantes, d’expérimentales, d’artisanales et, surtout, de non coordonnées et peu partagées entre acteurs à un mode opératoire industriel porté par des filières, des organisations, des modèles financiers et des compétences consolidées et déployables massivement ne se fasse pas aussi rapidement que prévu. Beaucoup ont engagé des réflexions sur le sujet et contribué à proposer des pistes et des méthodes (voir le très intéressant ouvrage « Massification de la rénovation énergétique » de Karim Beddiar, Pascal Chazal, Riad Ziour paru en 2022).

Comme dans tout process industriel, avant le passage à l’échelle, il existe une phase fondamentale que la précipitation ne doit certainement pas nous faire oublier : le premier de série. Une phase clé qui permet de réunir toutes les parties prenantes du process industriel à venir sur une réalisation pour en identifier la capacité d’industrialisation.

Engager des premiers de séries dans une logique collaborative

Nous posons donc, ici, l’idée d’un programme intégrant l’ensemble des acteurs (bailleurs des parcs publics et privés, entreprises du bâtiment, fabricants de matériaux, ingénieries techniques et financières, acteurs de référence et certificateurs, écosystèmes d’innovation et pouvoirs publics). L’objectif est d’engager de véritables premiers de séries dans une logique collaborative : des projets de rénovation énergétiques représentatifs de la diversité des situations, des enjeux, des territoires. Au travers d’un process coordonné, il s’agira de mettre en commun les modes opératoires, les process, les bonnes pratiques et d’adapter (consolider et rendre plus flexibles) les rotules juridiques financières, techniques opérationnelles et organisationnels qui seront bientôt mises à rude épreuve.

Accélération et massification »

Cette démarche devra permettre de faire un état des lieux des points de faiblesses identifiés à adresser, d’amorcer des logiques partenariales industrielles et de filières qui permettront aux acteurs et aux territoires de se préparer collectivement à l’accélération et à la massification. Ces travaux pourraient être partagées et induire des plans de mise à niveau par secteur, par territoire et permettre à chacun de trouver ses propres ajustements et de se préparer au mieux à l’ascension qui se profile.

Deux réflexions partagées donc qui font certainement échos à d’autres déjà mises sur la table qu’il convient de travailler pour traduire l’idée en dispositions réellement acceptables et efficaces. Deux réflexions qui ont comme commun d’inciter les acteurs à innover ensemble et à imaginer et concevoir les modèles globaux qui intègrent toutes les composantes d’une équation qu’il va bien falloir parvenir à résoudre.

Où se joue la question de la cohésion sociale dans une période qui semble progressivement glisser vers une société à deux vitesses ? A l’école, à l’hôpital et bien sûr à la maison. L’éducation, comme la santé et le logement, sont des fondamentaux de société qui ne se discutent pas.

La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La prochaine édition a lieu le 25/08/2023 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) sur le thème de l’urgence à agir. Jean-Luc Berho est président de la Coopérative de l’immobilier, à Toulouse. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.

Arnaud Ménard


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Parcours

Axim
Responsable de programmes & développement durable
Greenaffair
Directeur stratégie commerciale

Établissement & diplôme

Centrale Nantes (École centrale de Nantes)
Ingénieur

Fiche n° 49419, créée le 16/06/2023 à 18:43 - MàJ le 16/06/2023 à 18:49

Impulse Partners

• Société par actions simplifiée (SAS)
• Missions : conseil en stratégie, innovation et performance spécialisée dans les domaines de la construction, du bâtiment, l’aéronautique, l'énergie et la grande consommation
• Création : 2011
• Fondateur : Thomas Le Diouron
• Associés : Arnaud Ménard et Antoine Thuillier
• Effectif : 16 personnes
• Chiffre d’affaires : nc
• Tel. 01 83 64 40 25
• Adresse : 130 Rue de Lourmel à Paris (75015)
contact@impulse-partners.com


Catégorie : Cabinet d'expertise, études et ingénierie


Adresse du siège

130 Rue de Lourmel Paris
75015 Paris France


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Fiche n° 8848, créée le 27/06/2019 à 12:36 - MàJ le 16/06/2023 à 19:35

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Fiche n° 8848, créée le 27/06/2019 à 12:36 - MàJ le 16/06/2023 à 19:35

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