
Garanties locatives : comment la flexisécurité vise à concilier deux objectifs (Jérôme Drunat, APAGL)
En 2025, l’association pour l’accès aux garanties locatives (structure du groupe Action Logement
• Missions : faciliter l’accès au logement pour favoriser l’emploi
• Création : 1953 (Participation des Employeurs à l’Effort de Construction dit 1 % logement)
• Organisation :
- Action Logement…
) fête ses 20 ans. Pilotée par les partenaires sociaux, elle agit au cœur du lien emploi -logement dans le parc locatif privé. Pour 410 000 emménagements annuels dans le parc social, le secteur locatif privé en accueille 1,8 million, écrit Jérôme Drunat

, directeur général de l’APAGL
Association pour l’accès aux garanties locatives - Organisme paritaire en charge d’organiser et piloter tout dispositif de sécurisation du parc locatif privé, dont la garantie Visale depuis 2016
, dans une tribune adressée à News Tank le 20/11/2025.
Association paritaire d’utilité sociale, l’APAGL est, avec ALG, ALI
Action Logement Immobilier
, ALS
Action Logement Services - filiale d’Action Logement Groupe chargée de collecter la participation employeur (PEEC ex 1 % logement) et de distribuer les emplois
et AFL, l’une des cinq structures constitutives d’Action Logement. Elle a pour mission de concevoir, d’organiser et de piloter les dispositifs de sécurisation locative du groupe. Spécialiste du marché locatif privé, elle a conçu et pilote le dispositif Visale
Contrat de cautionnement gratuit et dématérialisé d’Action Logement, qui garantit les loyers et les charges impayés des parcs locatifs privés pour accompagner les locataires vers l’emploi
.
L’un des enjeux de la sécurisation locative est de préserver les revenus des bailleurs, donc, la rentabilité locative. Comme tout investissement, louer comporte un risque, dont celui de l’impayé. Le niveau de sécurisation recherché est un choix individuel qui dépend de l’appétence au risque du propriétaire, de son expérience et des représentations collectives du risque locatif. Pour se prémunir des impayés, plusieurs solutions existent : sélection des candidats, caution, assurance loyer impayé, GLI
Garantie de loyer impayé
(payée par le bailleur, ou inversée, payée par le locataire). La flexisécurité doit concilier deux objectifs : la flexibilité permettant aux entreprises d’ajuster rapidement emploi et production, et la sécurité garantissant aux travailleurs des droits effectifs (revenus, protection sociale, logement).
Voici la tribune de Jérôme Drunat.
20 ans de sécurisation locatives
En 2025, l’association pour l’accès aux garanties locatives (APAGL), structure du groupe Action Logement, fête ses 20 ans d’existence. Pilotée par les Partenaires sociaux, elle agit au cœur du lien emploi/logement, le parc locatif privé : pour 410 000 emménagements annuels dans le parc social, le secteur locatif privé en accueille 1,8 million. L’APAGL
Association pour l’accès aux garanties locatives - Organisme paritaire en charge d’organiser et piloter tout dispositif de sécurisation du parc locatif privé, dont la garantie Visale depuis 2016
défend l’idée que les difficultés d’accès au logement relèvent d’un risque social combinant stabilité professionnelle et résidentielle. Dans un contexte où 4 embauches sur 5 sont en contrat précaire, Visale
Contrat de cautionnement gratuit et dématérialisé d’Action Logement, qui garantit les loyers et les charges impayés des parcs locatifs privés pour accompagner les locataires vers l’emploi
démontre l’efficacité d’une sécurisation locative ciblée.
L’un des enjeux de la sécurisation locative est de préserver les revenus des bailleurs, donc, la rentabilité locative. Comme tout investissement, louer comporte un risque, notamment celui de l’impayé, qui réduit la rentabilité et influence la décision d’acheter un logement pour le louer. Le niveau de sécurisation recherché est un choix individuel qui dépend de l’appétence au risque du propriétaire, de son expérience et des représentations collectives du risque locatif. Pour se prémunir des impayés, plusieurs solutions existent : sélection des candidats ; la caution ; l’assurance loyer impayé, GLI Garantie de loyer impayé (payée par le bailleur, ou inversée, payée par le locataire).
Les enjeux de la sécurisation locative
Toutefois ces pratiques cumulent des effets indésirables. La sélection des candidats, combinant critères objectifs et subjectifs, visant à gérer la sélection adverse, excluent de nombreux ménages précaires ou jeunes, sans éliminer totalement les candidats capables de contourner les critères via des justificatifs biaisés ou des garants de façade. La caution, qui s’ajoute aux critères de sélection de candidat, génère un biais de sélection : seuls les ménages disposant d’un capital social suffisant peuvent fournir un garant solvable. Les études du Credoc Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (2019) et de l’UNCLLAJ Union nationale des Comités Locaux pour le Logement Autonome des Jeunes (2020) montrent qu’un tiers des jeunes de 18-30 ans ont déjà renoncé à un logement faute de garant. Cela renforce les inégalités de mobilité : les jeunes sans caution déménagent 40 % moins souvent que ceux aidés par leur famille. Bonvalet & Lelièvre (INED Institut national d’études démographiques , 2020) montrent que cette rareté des garants rigidifie le marché locatif en limitant la mobilité géographique des jeunes actifs et étudiants.
Coût de l’assurance souvent répercuté sur les locataires »Cette caution, principalement personne physique, est largement utilisée : 58 % des baux privés (Crédit Logement et CSA en 2023)). Enfin l’assurance loyer impayé (GLI), proposée par les assureurs, accentue la segmentation du marché entre “locataires sûrs” et “locataires risqués”, contribuant à un verrouillage résidentiel qui limite la mobilité. Les analyses françaises (Insee, 2023 ; France Stratégie, 2022) montrent que plus de 60 % des ménages jeunes ou en emploi précaire ne satisfont pas ces critères, et qu’un tiers d’entre eux renonce à un emploi ou à une mobilité faute de pouvoir louer un logement. Elle peut de plus avoir un effet inflationniste avec le coût de l’assurance souvent répercuté sur les locataires via les loyers.
L’ensemble de ces constats confirment la thèse de la reproduction sociale, la caution renforce le rôle du capital familial dans l’accès à un logement autonome, mais aussi une segmentation des marchés locatifs dont les externalités externes sont fortement négatives. Pour moins de 30 ans, l’Agence nationale pour l’information sur le logement
• Statuts : association loi 1901, statuts fixés par l’article L.366-1 du Code de la construction et de l’habitation relatives aux organismes d’information sur le logement
• Création …
souligne que plus le bien loué se trouve en zone urbaine, plus les garanties exigées sont nombreuses. Or 87 % des moins de 30 ans se trouvent en zone fortement urbanisée, faisant de ce public le premier impacté.
Sécurisation locative comme élément d’une flexisécurité
La flexisécurité vise à concilier deux objectifs : la flexibilité, permettant aux entreprises d’ajuster rapidement emploi et production, et la sécurité, garantissant aux travailleurs des droits effectifs (revenus, protection sociale, logement). Les analyses récentes montrent qu’elle reste incomplète sans sécurité résidentielle, car la mobilité professionnelle dépend de la capacité à se loger rapidement dans une nouvelle zone. Les modèles de recherche d’emploi spatialisée (Marimon & Zilibotti, 1999 ; Wasmer & Zenou, 2002) démontrent que le coût de la mobilité résidentielle (prix du logement, rareté, garanties exigées) freine l’ajustement géographique du marché du travail. En France, l’Insee (2024) indique que 45 % des chômeurs voient le coût du logement comme un frein à la mobilité.
Sans sécurisation locative, la flexibilité géographique reste donc théorique, ce que les partenaires sociaux d’Action Logement avaient anticipé. Les outils traditionnels de sécurisation induisent une double contrainte : difficulté à se loger faute de garant ou de sélection des assureurs et perte d’opportunités professionnelles. La précarité du logement réduit la flexibilité du travail (OCDE, 2022). Les tests de discrimination de Le Gallo, L’Horty et Petit (2019) montrent que les bailleurs valorisent davantage un garant qu’un CDD Contrat à durée déterminée ou un temps partiel à revenu équivalent, faisant de la caution un substitut biaisé à la solvabilité réelle.
Une efficacité démontrée
Depuis 2016, plus de 1,8 million de ménages ont bénéficié de Visale. Près de 90 % des bénéficiaires sont hors-marché (taux d’effort supérieur à 33 % et/ou emplois précaires) et 92 % ont moins de 30 ans. Ils sont plus jeunes et plus souvent isolés que les locataires du parc privé. Le déploiement territorial reflète les flux réels de mobilité locative.
Deux évaluations (Credoc 2020 ; Pluricité/1630 Conseil 2025) confirment l’efficacité du dispositif tout au long du parcours locatif, de la recherche jusqu’à l’accès au logement. Elles montrent que Visale assouplit les critères de sélection : 70 % des bailleurs déclarent adapter leurs exigences grâce à la garantie, notamment sur les revenus et la stabilité professionnelle. Les évaluations convergent pour estimer que Visale a un effet décisif dans près de 9 logements obtenus sur 10, surtout pour les candidats sans autre solution de garantie.
Chaque euro investi génère 2,48 € d’utilité sociale »Les mobilités professionnelles et étudiantes en bénéficient nettement : 47 % des recherches de logement sont motivées par un emploi ou des études, et 28 % par une nouvelle activité professionnelle. Les secteurs d’emploi reflètent les dynamiques nationales : grande distribution, services aux entreprises, intérim, restauration. Des travaux de l’université de Berkeley montrent que Visale accroît l’accès au parc privé pour les ménages éligibles, avec des effets plus forts pour les ménages à revenus faibles ou instables et les étrangers, et qu’il facilite la mobilité vers des zones plus dynamiques.
La satisfaction est élevée : 92 % des bailleurs particuliers et 85 % des bailleurs professionnels se déclarent satisfaits : 77 % souhaitent réutiliser Visale. Du côté des locataires, la satisfaction est maximale pour un sur deux, et 91 % préfèrent Visale à toute autre caution ou assurance. Enfin, les externalités positives du dispositif sont importantes : réduction du chômage, du mal-logement, du temps de recherche et des distances domicile-travail. Chaque euro investi génère 2,48 € d’utilité sociale pour la collectivité.
Comme outil de la protection
La flexisécurité, dans sa conception économique, vise à rendre compatibles la fluidité du marché du travail et la sécurisation des parcours individuels. Cette compatibilité n’est effective que si l’on élargit la notion de “sécurité” à l’accès au logement, condition matérielle de toute transition professionnelle. Ainsi, dans une économie marquée par la discontinuité des carrières, la sécurisation locative (par la garantie, le logement abordable, la mobilité résidentielle) devient une variable stratégique de la flexisécurité.
Sans elle, la promesse d’un marché du travail fluide et inclusif reste incomplète. Visale démontre toute son efficacité à accompagner cette flexisécurité de fait. Par sa gratuité, contrepartie du ciblage voulu par les Partenaires Sociaux d’Action Logement, Visale agit sur cette flexisécurité.
Rubrique dirigée par Jean-Luc Berho
La rubrique est dirigée par Jean-Luc Berho (berhoji@laposte.net), créateur des Entretiens d’Inxauseta, événement annuel dédié aux politiques du logement et de l’habitat. La dernière édition le 29/08/2025 à Bunus (Pyrénées-Atlantiques) a été dédiée au logement en Europe. Jean-Luc Berho est président de Soliha Pays basque, président du conseil de surveillance de la Coopérative de l’immobilier à Toulouse, administrateur de l’association Aurore, administrateur d’Espacité et membre du Conseil national de l’habitat. La rubrique a vocation à mettre en exergue des avis experts sur l’accès au logement, le parcours résidentiel, la politique de la ville, l’urbanisme et l’aménagement des territoires, en France et à l’international.
Parcours
Directeur général
Enseignement
Directeur des risques, de l’audit et du contrôle
Directeur des études et des statistiques
Directeur des études économiques et financières
Directeur des statistiques et des prévisions
Chef de projet à la direction de la politique médicale
Fiche n° 44660, créée le 29/10/2021 à 10:05 - MàJ le 21/11/2025 à 08:12
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